Réorganisation en vue à EDF, confronté à de lourds défis
Renationalisation à 100% et changement de patron: l'Etat s'apprête à réorganiser EDF, confronté à de lourds défis industriels et financiers.
Le ministère de l’Économie a annoncé jeudi lancer "dès à présent" le processus de succession du PDG du groupe Jean-Bernard Lévy, afin de mettre "rapidement" en œuvre la renationalisation du groupe désirée par le gouvernement et annoncée mercredi.
"Alors que des chantiers d’envergure seront lancés par l’entreprise dans les prochains mois, l’Etat et Jean-Bernard Lévy sont convenus de lancer dès à présent le processus de succession de ce dernier à la tête d’EDF".
Le mandat de ce polytechnicien de 67 ans, à la tête d'EDF depuis 2014, une durée remarquable, devait prendre fin au plus tard le 18 mars 2023, compte tenu de la limite d’âge fixée par les statuts de la société.
Le nouveau PDG pourra cependant "être désigné avant cette échéance" pour pouvoir être "rapidement en mesure de mettre en œuvre les chantiers stratégiques et industriels annoncés par le président de la République", a indiqué Bercy.
"Je souhaite que la nouvelle direction d’EDF soit opérationnelle dès la rentrée prochaine", a même précisé sur Europe 1 le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire.
Pour lui, "il faut que ce soit quelqu'un qui maîtrise les grands programmes industriels, mais également qui ait le sens du compromis".
Le principe de cette prise de fonction anticipée a été acté "en accord avec Jean-Bernard Lévy", a indiqué le conseil d'administration du groupe, réuni dès 07H00 jeudi matin.
Dans l'intervalle, "le conseil a renouvelé sa confiance en Jean-Bernard Lévy, qui continuera d’assurer ses fonctions jusqu’à la nomination de son successeur".
- Prélude à restructuration?-
"Nationaliser EDF, c'est nous donner toutes les chances d'être plus indépendants dans les années qui viennent en matière énergétique", a déclaré jeudi Bruno Le Maire. "C'est une décision stratégique forte et nécessaire pour le pays", a assuré le ministre.
Le gouvernement cite "notamment le lancement du programme de construction de six réacteurs nucléaires EPR 2 et la contribution d’EDF au développement accéléré des énergies renouvelables".
Mercredi, la Première ministre Élisabeth Borne avait annoncé devant l'Assemblée nationale une renationalisation à 100%, déjà évoquée en mars par Emmanuel Macron.
Dix-sept ans après l'ouverture de son capital et son entrée en Bourse fin 2005, l'électricien est aujourd'hui détenu par l'État à près de 84%, par les salariés pour 1% et par des actionnaires institutionnels et individuels pour les 15% restants.
Mais le groupe, fortement endetté, est confronté à de lourdes charges financières, présentes et à venir, et de vastes chantiers industriels.
Alors qu'environ la moitié de ses 56 réacteurs est aujourd'hui à l'arrêt, pour maintenance mais aussi pour des problèmes de corrosion apparus récemment, EDF doit gérer le maintien d'un parc vieillissant. Le gouvernement lui demande aussi de lancer un programme de nouveaux EPR, dont le seul modèle actuellement en construction en France, à Flamanville (Manche), accuse plus de dix ans de retard.
Plombé par une dette qui pourrait atteindre plus de 60 milliards d'euros fin 2022, l'électricien a aussi vu sa situation financière dégradée par la décision du gouvernement de lui faire vendre davantage d'électricité bon marché à ses concurrents, pour contenir la facture d'électricité des Français. Une décision qui avait alors quelque peu tendu les rapports entre M. Lévy et l'Etat.
Quant aux représentants du personnel, ils ont accueilli mercredi la nouvelle d'une nationalisation avec une certaine méfiance, craignant un prélude à une restructuration plus vaste, dans le cadre de négociations menées sur le statut de l'entreprise entre Paris et Bruxelles.
Q.Marshall--TNT