Commission des Finances: l'Insoumis Eric Coquerel l'emporte
C'est un trophée de poids pour les Insoumis: le député Eric Coquerel a été élu jeudi à la présidence de la commission des Finances de l'Assemblée nationale, un poste stratégique dévolu à l'opposition et qu'espérait le RN.
Matignon a par ailleurs indiqué à l'AFP que la déclaration de politique générale d'Elisabeth Borne aura lieu mercredi à l'Assemblée et au Sénat.
Candidat commun de la coalition de gauche Nupes (LFI, PS, EELV, PCF), l'élu de Seine-Saint-Denis - cravaté pour l'occasion - s'est imposé au troisième tour avec 21 voix contre 11 pour le candidat RN Jean-Philippe Tanguy et 9 pour la LR Véronique Louwagie, alors que les députés de la majorité se sont abstenus.
La commission des Finances, dont la présidence est réservée à l'opposition depuis 2007, occupe un rôle stratégique d'examen des budgets avant leur arrivée dans l'hémicycle ou de projets de loi comme celui sur le pouvoir d'achat attendu en juillet. La présidence offre l'accès à des informations couvertes par le secret fiscal, sans cependant pouvoir les dévoiler.
Le mandat court pour un an, comme toutes les présidences de commissions permanentes.
- "Pas de chasse aux sorcières" -
Des élus LREM, LR ou RN avaient accusé Eric Coquerel de vouloir se servir de ses prérogatives à des fins politiques, pendant que le député LFI criait aux "fake news".
"Il faut arrêter avec ca, l'idée ce n'est pas de faire une chasse aux sorcières personnelle", a-t-il répété jeudi dès son élection, dans la salle des Quatre colonnes.
Il a promis des débats sur le "fond" et s'est réjoui que "l'Assemblée nationale redevienne un peu plus le centre de gravité politique de ce pays".
Agé de 63 ans, Eric Coquerel partait favori en tant que candidat commun de la Nupes. Il a été préféré en interne à la socialiste Valérie Rabault.
Contrainte de renoncer face au leadership des LFI, plus importante force de gauche à l'Assemblée, elle a obtenu en échange une vice-présidence de l'institution. M. Coquerel siégeait déjà dans cette commission de quelque 70 membres lors de la précédente législature.
Aussitôt après l'élection, le candidat RN Jean-Philippe Tanguy a de nouveau dénoncé la "piraterie" de la Nupes et une "présidence illégitime" de LFI, malgré les "mots rassembleurs de bon aloi" d'Eric Coquerel. Le Rassemblement national espérait un front anti-LFI et les voix de LR. "C'est dommage, maintenant ils géreront monsieur Coquerel et ses amis", a ajouté M. Tanguy.
Le parti d'extrême droite estime que la présidence aurait dû lui revenir en tant que premier groupe d'opposition avec 89 députés, pendant que la Nupes, 151 élus au total, est composée de quatre groupes distincts.
Mais le règlement stipule simplement que le poste doit revenir à un élu d'un groupe d'opposition.
Pour Patrick Hetzel (LR), "les choses se sont déroulées comme prévu arithmétiquement. C'est une élection pour un an, d'ici là, on verra si ça s'est mal passé".
Le député de la majorité Jean-René Cazeneuve (Renaissance, nouveau nom de LREM), seul candidat, a obtenu l'autre poste clé de cette commission, rapporteur général du Budget.
Les autres présidences de commissions se partagent entre 7 élus de la majorité: 5 Renaissance, une élue Horizons et un MoDem.
- Parité en question -
Aux Lois, notamment, c'est Sacha Houlié (Renaissance), 33 ans, qui présidera. Aux Affaires sociales, Fadila Khattabi (Renaissance) a été réélue, tandis que sa collègue Stéphanie Rist (Renaissance) sera rapporteur générale.
Contrairement à 2017, la parité n'est pas respectée à ces hauts postes. Mais les macronistes s'abritent derrière l'élection de Yaël Braun-Pivet à la présidence de l'Assemblée, première femme au perchoir, et d'Aurore Bergé comme patronne du groupe parlementaire LREM, ainsi que des vice-présidences féminines.
Ces élections interviennent au lendemain d'une journée chahutée au Palais Bourbon pour constituer le bureau de l'institution, mais aussi pour l'exécutif, confronté à l'ouverture d'une enquête pour tentative de viol après qu'une femme a déposé plainte contre le ministre des Solidarités Damien Abad.
Que vont décider Emmanuel Macron, de retour en France jeudi soir après un long tunnel de sommets internationaux, et la Première ministre Elisabeth Borne? La question du maintien au gouvernement de M. Abad est posée, alors qu'un remaniement doit avoir lieu prochainement.
Pour un cadre de la majorité, la plainte "change la donne" et "c'est l'intérêt de personne qu'il reste".
parl-adc/chl/dch
R.Hawkins--TNT