Censure: nouvel appel de Barnier à la "responsabilité", Macron ne veut pas y "croire"
Emmanuel Macron ne peut "pas croire" à la censure du gouvernement de Michel Barnier, qui a une nouvelle fois appelé mardi soir à la "responsabilité", à la veille d'un vote crucial à l'Assemblée qui lance d'ores et déjà les spéculations pour Matignon.
Éviter la censure alors que le Rassemblement national, en plus de présenter son propre texte, devrait voter la motion de la gauche ? "Je pense que c'est possible", a assuré le Premier ministre sur France 2 et TF1.
Michel Barnier en a appelé au "réflexe de responsabilité" des députés, mettant particulièrement l'accent sur ceux du Rassemblement national qui devront "rendre des comptes" à leurs électeurs s'ils s'associent à la motion de censure de "l'extrême gauche".
"On n'est pas dans du marchandage", mais Marine Le Pen est entrée "dans une sorte de surenchère", a répondu le Savoyard, interrogé sur la possibilité d'un dernier geste sur les pensions de retraites, pour éviter de devenir mardi le premier chef du gouvernement renversé par l'Assemblée depuis Georges Pompidou en 1962 et le plus bref Premier ministre de l'histoire de la Ve République.
"Ce n'est pas moi qui suis en cause", mais l'évènement aurait des conséquences: "18 millions" de Français "verront leur impôt sur le revenu augmenter", a affirmé M. Barnier, si son gouvernement venait à être renversé et le budget pas adopté.
Il a écarté les multiples appels ou évocations d'une démission du chef de l'Etat, la dernière en date par le président (LR) de l'Association des maires de France, David Lisnard.
"Politique fiction", avait balayé un peu plus tôt le président lui-même, de Ryad où il est en visite d’État.
M. Macron a dénoncé un "cynisme insoutenable" du RN s'il votait une motion déposée par la gauche "qui insulte ses électeurs". Argument repris sur TF1 et France 2 par le Premier ministre, texte de la motion du Nouveau Front populaire à la main.
Quant au PS, il fait preuve d'une "perte de repères complète" en censurant le gouvernement, a accusé M. Macron.
Le chef de l’État a, enfin, cependant, appelé à ne "pas faire peur" en évoquant des risques de crise financière.
- Fin de règne -
A l'Assemblée, la conférence des présidents a fixé à mercredi 16H00 l'examen des motions de censure déposées par la gauche et le RN. Et pour la cheffe des députés insoumis Mathilde Panot, "la chute de Barnier est actée".
Nommé le 5 septembre, il aura tenu trois mois grâce au "soutien sans participation du RN" et, "ce qui le fera tomber, c'est justement que le RN aura cessé de le soutenir", a commenté de son côté le député PS Arthur Delaporte.
Renverser le gouvernement serait "une dissolution des esprits", "mais je n'y crois pas", a insisté Emmanuel Macron. "Tout le monde va prendre ses responsabilités demain", a-t-il ajouté, en se refusant à envisager publiquement les options pour remplacer Michel Barnier à Matignon.
M. Barnier a enregistré mardi soir le soutien du président (LR) du Sénat Gérard Larcher qui a appelé, dans une tribune, les députés au "sursaut" pour "dépasser les rancœurs".
Lundi, le Premier ministre a engagé sans surprise la responsabilité de son gouvernement sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), assurant avoir été "au bout du dialogue" avec les groupes politiques, y compris le Rassemblement national.
- "Sans plan derrière" -
Les gestes annoncés par Michel Barnier pour répondre aux exigences du RN n'auront pas suffi: "Censurer ce budget est, hélas, la seule manière que nous donne la Constitution pour protéger les Français d'un budget dangereux, injuste et punitif", a justifié mardi Marine Le Pen sur X.
"Je ne croyais pas qu'elle oserait", a lâché le Premier ministre lundi après une conversation téléphonique avec la cheffe de file des députés RN.
"C'est le RN qui a obtenu le plus de gains politiques", mais Mme Le Pen "préfère les sacrifier sur le dos des Français", déplore-t-on dans l'entourage du chef du gouvernement.
Elle a "un agenda personnel", ajoute-t-on de même source, dans une allusion au procès des assistants du RN au Parlement européen, où Marine Le Pen risque l'inéligibilité.
Si l'exécutif tombait, la France s'enfoncerait encore plus dans la crise politique créée par la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron en juin.
- Spéculations -
Sur les marchés financiers, les taux d'intérêt auxquels emprunte la France se sont tendus face aux incertitudes. Mais la Bourse de Paris est restée quasi-stable, les investisseurs se focalisant pour le moment sur les avantages d'un statu quo budgétaire en cas de censure.
Les spéculations vont déjà bon train sur les successeurs potentiels à Michel Barnier, du ministre des Armées Sébastien Lecornu au centriste François Bayrou dans le camp présidentiel.
"Ce n'est vraiment pas le sujet", a répondu Sébastien Lecornu dans Le Parisien, évoquant "le jeu pas toujours bienveillant" de ceux qui font circuler son nom.
L'équation reste toutefois la même à l'Assemblée: aucune configuration ne semble promettre une majorité pour faire passer un budget pour 2025.
Le premier secrétaire du PS Olivier Faure a appelé Emmanuel Macron à nommer un "Premier ministre de gauche", mais ouvert "au compromis" avec le bloc central, en se disant prêt à prendre ses responsabilités pour Matignon.
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S.Mitchell--TNT