Israël/Gaza: le Hezbollah libanais promet de continuer le combat malgré l'attaque aux bipeurs
Le mouvement islamiste libanais Hezbollah a affirmé mercredi qu'il "continuera" ses opérations de soutien à Gaza, malgré la vague meurtrière d'explosions de bipeurs qui l'a visé et qu'il impute à Israël.
L'explosion simultanée mardi à travers le Liban de ces bipeurs utilisés par le mouvement chiite a fait neuf morts et près de 2.800 blessés, dont des centaines de membres du mouvement libanais soutenu par l'Iran, selon le ministère de la Santé, un événement sans précédent.
Israël n'a pas commenté ces explosions, survenues dans plusieurs places fortes du Hezbollah quelques heures après l'annonce par ce pays qu'il étendait les objectifs de la guerre contre le Hamas palestinien dans la bande de Gaza à sa frontière nord avec le Liban.
Une source proche du Hezbollah a expliqué mardi que "des centaines de membres" du mouvement "avaient été blessés par l'explosion simultanée de leurs bipeurs", un système de radiomessagerie, dans la banlieue sud de Beyrouth, dans le sud du Liban et dans la plaine orientale de la Békaa.
Le Hezbollah a affirmé qu'Israël était "entièrement responsable" et assuré qu'il allait "recevoir son juste châtiment".
Le mouvement a réaffirmé mercredi qu'il "continuera" ses opérations de soutien à Gaza malgré cette attaque.
Il a précisé, dans un communiqué publié sur Telegram, que cette voie était "distincte du difficile bilan que l'ennemi criminel (Israël, NDLR) doit attendre pour son massacre de mardi".
Le Hamas a dénoncé de son côté une "agression terroriste sioniste".
- Scènes de chaos -
Des dizaines d'ambulances transportant des blessés ont afflué mardi vers les hôpitaux à Beyrouth, dans la Békaa ainsi qu'à Saïda, dans le sud du Liban.
Dans la banlieue sud de Beyrouth, des tentes ont été installées pour accueillir des habitants qui se sont précipités pour donner leur sang.
Des blessés étaient allongés en pleine rue au milieu des embouteillages, ou à même le sol dans un hôpital de la banlieue sud de Beyrouth. Des images vidéo montraient un bipeur explosant dans les mains d'un homme en plein marché.
"De ma vie, je n'ai jamais vu ça", a témoigné à l'AFP Moussa, qui a demandé à être identifié par son seul prénom. "Ca a explosé d'un coup (...) j'ai trouvé devant moi des gens allongés par terre".
Parmi les morts figure une fillette de dix ans tuée par l'explosion du bipeur de son père, ainsi que le fils d'un député du Hezbollah.
L'ambassadeur d'Iran à Beyrouth, Mojtaba Amani, a été blessé, a annoncé la télévision iranienne.
Quatorze membres du Hezbollah en Syrie ont également été blessés par l'explosion de leurs bipeurs, selon une ONG.
Le ministre de l'Education libanais, Abbas Halabi, a annoncé la fermeture mercredi des écoles et des universités, pour condamner "cet acte criminel commis par l'ennemi israélien".
Les Etats-Unis, premier allié d'Israël, n'étaient "pas au courant" à l'avance des explosions, a affirmé le département d'Etat, en exhortant l'Iran à éviter tout acte qui aggraverait les tensions dans la région.
L'impact de ces explosions sur les communications du Hezbollah n'était pas clair dans l'immédiat.
Une source proche du mouvement a indiqué à l'AFP que "les bipeurs qui ont explosé concernent une cargaison récemment importée par le Hezbollah de 1.000 appareils", qui semblent avoir été "piratés à la source".
"D'après les enregistrements vidéo (...), un petit explosif de type plastic a certainement été dissimulé à côté de la batterie (des bipeurs) pour un déclenchement à distance via l'envoi d'un message", a estimé sur X Charles Lister, expert au Middle East Institute (MEI).
Ce qui signifie pour lui que "le Mossad (service secret extérieur israélien, en charge des opérations spéciales, ndlr) a infiltré la chaîne d'approvisionnement".
Cette série d'explosions marque une "escalade extrêmement inquiétante", a affirmé l'ONU.
Le fabricant taïwanais Gold Apollo a nié avoir fabriqué les bipeurs, après des informations du New York Times citant ce groupe comme le fournisseur des produits.
- "Action militaire" -
Israël avait annoncé mardi sa décision d'étendre les buts de la guerre jusqu'à la frontière israélo-libanaise, afin de permettre le retour des déplacés. Les principaux objectifs affichés jusqu'à présent étaient la destruction du Hamas, au pouvoir depuis 2007 à Gaza, et le retour des otages.
Lundi, le ministre de la Défense israélien, Yoav Gallant, avait averti qu'en l'absence de solution diplomatique, "le seul moyen restant pour garantir le retour des habitants du nord d'Israël dans leurs foyers" serait "une action militaire".
Mardi, une frappe israélienne à Blida, dans le sud du Liban, a fait trois morts selon les autorités libanaises, l'armée israélienne affirmant avoir tué des membres du Hezbollah. Le mouvement libanais a annoncé des tirs contre des positions militaires dans le nord d'Israël.
Mardi soir, la compagnie aérienne allemande Lufthansa a annoncé la suspension, au moins jusqu'à jeudi, de ses vols de et vers Tel-Aviv et Téhéran. Air France suspend de son côté ses liaisons avec Beyrouth et Tel-Aviv, également jusqu'au 19 septembre.
- Blinken au Caire -
Dans ce contexte inflammable, le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken est arrivé mercredi à l'aube au Caire pour discuter d'une nouvelle proposition en vue d'un cessez-le-feu à Gaza et d'une libération des dizaines d'otages qui y sont retenus.
Après des mois de négociations infructueuses, Washington a déclaré toujours travailler avec les médiateurs, le Qatar et l'Égypte, pour finaliser une proposition d'accord susceptible de convenir aux deux parties.
"Nous voulons, lorsque nous présentons une proposition, savoir qu'elle sera acceptée", a souligné le porte-parole du Département d'Etat, Matthew Miller.
Le 7 octobre 2023, des commandos du Hamas ont mené une attaque sans précédent sur le sol israélien, qui a entraîné la mort de 1.205 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur les chiffres officiels qui inclut les otages tués en captivité.
Sur les 251 personnes enlevées pendant l'attaque, 97 sont toujours retenues à Gaza, dont 33 ont été déclarées mortes par l'armée.
En représailles, Israël a promis de détruire le Hamas, qu'il considère comme une organisation terroriste de même que l'Union européenne et les Etats-Unis.
Son armée a lancé une offensive qui a fait au moins 41.252 morts, selon le ministère de la Santé du gouvernement du Hamas à Gaza, qui ne détaille pas les combattants et les civils tués.
E.Reid--TNT