Législatives en Mongolie: le parti au pouvoir voit sa majorité se réduire
Le parti au pouvoir en Mongolie est sorti samedi des élections législatives avec une majorité considérablement réduite, selon les médias locaux, après une campagne dominée par les questions de corruption et de pouvoir d'achat.
Le Premier ministre Luvsannamsrain Oyun-Erdene avait revendiqué dans la nuit la victoire de son parti au scrutin de vendredi, au cours duquel ont été élus les 126 membres du Grand Khoural d'Etat - le parlement monocaméral du pays.
Le Parti du peuple mongol (PPM), au pouvoir, a remporté 68 sièges et conserve ainsi de justesse la majorité absolue, a indiqué samedi le média mongol Ikon, sur la base des chiffres fournis par la commission électorale.
La principale formation d'opposition, le Parti démocrate, en a obtenu 42, tandis que le parti anticorruption de centre-droit, HUN, a réussi à faire élire huit députés. D'autres petits partis ont remporté huit sièges au total.
La Mongolie, située en Asie de l'Est entre la Russie et la Chine, compte un vaste territoire (trois fois la France métropolitaine) mais ne compte que 3,4 millions d'habitants.
Lors d'une conférence de presse samedi dans la capitale Oulan-Bator, le chef de la commission électorale a indiqué qu'il restait encore des bulletins à dépouiller manuellement, afin de confirmer les résultats obtenus grâce au vote électronique.
"Il ne reste que six ou sept bureaux de vote, mais le comptage manuel correspond à 100% à celui des machines", a-t-il déclaré.
- Coût de la vie -
La conséquence de ces élections législatives est donc que le PPM devra désormais gouverner avec une majorité considérablement réduite.
Au sein du parlement nouvellement élu, il détiendra désormais quelque 54% des sièges - contre plus de 80% durant la précédente mandature entamée en 2020.
"Ce résultat constitue sans aucun doute un signe de désapprobation pour le PPM et l'ensemble de ses dirigeants", déclare à l'AFP l'analyste politique Bayarlkhagva Munkhnaran.
Le fait d'avoir remporté 68 sièges est "à peine suffisant pour sauver la face", estime-t-il.
"Les plus grands gagnants, ce sont les Mongols qui se sont rendus en nombre dans les bureaux de vote et ont confirmé leur soutien sans équivoque à la voie démocratique" suivie par le pays depuis les années 1990, souligne-t-il.
La plupart des analystes s'attendaient à ce que le PPM conserve la majorité dont il jouit depuis 2016 et gouverne pour quatre années supplémentaires.
Le succès du parti tient en grande partie à l'essor du secteur de l'exploitation du charbon, qui a permis de générer une forte croissance et une amélioration spectaculaire du niveau de vie.
Mais la campagne a été dominée par le profond ressentiment de nombreux Mongols face à la corruption qu'ils jugent endémique et au coût élevé de la vie.
Une grande partie des Mongols pensent également que les fruits de l'essor du secteur du charbon sont accaparés par une élite fortunée, ce qui a régulièrement donné lieu à des manifestations.
- "Contre eux" -
Dans les rues d'Oulan-Bator, Myagmariin Dulguun, 25 ans, un barman arborant des tatouages, déclare à l'AFP qu'il avait participé à ces manifestations et qu'il n'est "pas du tout content" du résultat des législatives.
"Je ne m'attendais pas à la victoire du PPM. Tout le monde autour de moi était contre eux", affirme-t-il.
"On a besoin de réformes politiques. On doit continuer à manifester."
L'un des autres motifs de mécontentement au sein de la société est le manque d'opportunités pour les jeunes - qui représentent près des deux tiers de la population.
Nombreux sont ceux qui ne se sentent pas représentés par la classe politique mongole traditionnelle, ce qui alimente la popularité de petits partis qui ciblent directement la jeunesse urbaine.
Oyuntsetseg Khaliun, 19 ans, qui votait pour la première fois, déclare à l'AFP qu'elle soutient Volonté civile-Parti vert, une formation libérale qui a remporté quatre sièges.
"Les députés du PPM étaient déjà au pouvoir lorsque j'étais petite, et ils sont toujours là", affirme-t-elle.
"Et la vie n'a pas changé. Regardez les rues."
Elle dit devoir souvent attendre une heure pour prendre un bus en hiver, lorsque les températures dans la capitale mongole peuvent descendre jusqu'à moins 30 degrés.
"On doit changer les personnes au pouvoir pour se débarrasser de la corruption."
S.Mitchell--TNT