Israël menace de ramener le Liban "à l'Age de pierre" en cas de guerre avec le Hezbollah
Israël ne veut pas d'une guerre contre le Hezbollah mais a la capacité de ramener le Liban à "l'Age de pierre" le cas échéant, a prévenu son ministre de la Défense sur fond de craintes onusiennes d'une extension "potentiellement apocalyptique" du conflit à Gaza.
"Le Hezbollah comprend très bien que nous pouvons infliger d'énormes dégâts au Liban si une guerre est lancée", a déclaré à la presse le ministre Yoav Gallant à l'issue d'une visite de plusieurs jours à Washington.
"Nous avons la capacité de ramener le Liban à l'Age de pierre, mais nous ne voulons pas le faire (...) Nous ne voulons pas d'une guerre", a-t-il ajouté, précisant que le gouvernement israélien "se préparait à tout scénario".
La propagation au Liban de la guerre que mène Israël contre le Hamas dans la bande de Gaza serait "potentiellement apocalyptique", avait plus tôt averti depuis Genève le chef des affaires humanitaires de l'ONU, Martin Griffiths.
"Je vois cela comme l'étincelle qui mettra le feu aux poudres", a-t-il souligné, estimant qu'un conflit impliquant le Liban "gagnera la Syrie... gagnera les autres" territoires de la région, entraînant des conséquences "imprévisibles".
Dans la nuit de mercredi à jeudi, des témoins ont fait état de bombardements dans différents secteurs de la bande de Gaza, tandis qu'au Liban, cinq personnes ont été blessées dans une frappe aérienne israélienne sur un immeuble de Nabatiyeh (sud), selon l'agence officielle libanaise Ani.
En Syrie, deux personnes ont été tuées dans une frappe israélienne peu avant minuit, a annoncé l'agence officielle Sana en citant une source militaire. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), la frappe a visé un centre de services d'une fondation affiliée au Hezbollah libanais et à des groupes pro-iraniens, près de la capitale Damas.
Et au Yémen, le Commandement de l'armée américaine pour le Moyen-Orient a indiqué avoir détruit un "radar" des rebelles Houthis, alliés du Hamas, qui ciblent le trafic maritime international en mer Rouge et dans le Golfe d'Aden en "solidarité" avec la population de Gaza.
- Le Liban, après Gaza ? -
La guerre à Gaza a entraîné une flambée de violences à la frontière entre Israël et le Liban, où les échanges de tirs sont presque quotidiens entre le Hezbollah libanais, un allié du Hamas palestinien, et l'armée israélienne.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a annoncé dimanche que la phase "intense" des combats touchait à sa fin dans la bande de Gaza et affirmé qu'ensuite, Israël pourrait "redéployer certaines forces vers le nord", à la frontière avec le Liban, "à des fins défensives".
"Il semble qu'Israël, qui a dévasté Gaza, jette désormais son dévolu sur le Liban. Nous voyons que les puissances occidentales soutiennent Israël en coulisses", a déclaré de son côté le président turc Recep Tayyip Erdogan.
"Les projets de Netanyahu d'étendre la guerre à la région conduiront à un grand désastre", a-t-il ajouté. Comme le Canada, l'Allemagne a emboîté en appelé mercredi ses ressortissants à quitter le Liban.
- "Guerre régionale" -
"Une guerre entre Israël et le Hezbollah pourrait facilement devenir une guerre régionale, avec des conséquences désastreuses pour le Moyen-Orient", s'est lui aussi inquiété le secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin, en recevant M. Gallant à Washington.
Le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, avait averti la semaine dernière qu'"aucun lieu" en Israël ne serait le cas échéant épargné par son mouvement, au lendemain d'une annonce de l'armée israélienne selon laquelle "des plans opérationnels pour une offensive au Liban" avaient été "validés".
Le Hezbollah a ouvert le front avec Israël en soutien au Hamas au lendemain de l'attaque perpétrée le 7 octobre par le mouvement islamiste palestinien dans le sud d'Israël, qui a entraîné la mort de 1.195 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes.
Sur 251 personnes enlevées durant l'attaque, 116 sont toujours retenues en otages à Gaza, dont 42 sont mortes, selon l'armée.
En représailles, Israël a lancé une offensive dans la bande de Gaza où plus de 37.718 Palestiniens, en majorité des civils, ont été tués depuis le début de la guerre, selon le ministère de la Santé du gouvernement dirigé par le Hamas.
- "Besoin d'eau" -
La guerre a provoqué une catastrophe humanitaire dans le territoire de 2,4 millions d'habitants assiégé par Israël, où 495.000 personnes souffrent de la faim à un niveau "catastrophique", selon un rapport publié mardi par le Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC), sur lequel se basent les agences de l'ONU.
L'eau manque aussi en plein été dans le territoire surpeuplé, où les habitants se pressent avec des bidons quand arrive un camion chargé de citernes.
L'ouverture en mars d'un couloir maritime depuis Chypre a permis l'envoi à Gaza de 7.000 tonnes d'aide humanitaire, dont 6.000 tonnes restent entreposées en raison des pillages et de la violence qui empêchent leur distribution, ont affirmé mercredi des responsables américains réunis à Chypre.
"Je n'ai jamais vu un environnement aussi difficile ou complexe" pour les humanitaires, a déclaré Doug Stropes, de l'USAID, l'agence américaine pour le développement.
"La crise s'est aggravée avec l'arrivée de l'été. Les gens ont besoin d'eau pour boire et se laver", témoigne Muhammad Bashir, qui répare dans son atelier de Deir el-Balah, dans le centre de Gaza, des dizaines de réservoirs endommagés ou percés par des éclats d'obus.
A.Wood--TNT