Nicaragua: l'opposante Chamorro jugée "coupable" de délits financiers
La principale opposante au Nicaragua, Cristiana Chamorro, a été reconnue coupable vendredi de crimes dont l'accusait le gouvernement de Daniel Ortega, et qui l'avaient empêché de participer à la présidentielle de novembre où elle était favorite.
Mme Chamorro était notamment poursuivie pour blanchiment d'argent et mensonge idéologique.
"Ils veulent salir mon nom, mais ils ne réussiront pas, mais ils ne réussiront jamais à salir le nom de mon père ou de ma mère, parce que je suis innocente", a déclaré la cheffe de file de l'opposition à la fin du procès, selon 100% Noticias, un site critique du gouvernement.
Pour l'accusation, les faits reprochés auraient été commis par l'intermédiaire de la Fondation Violeta Barrios de Chamorro (FVBCH), un centre de formation et de défense de la liberté de la presse que Cristiana Chamorro a dirigé pendant vingt ans. La fondation servait à recevoir de l'argent de l'étranger destiné à déstabiliser le gouvernement de Daniel Ortega et de sa vice-présidente et épouse Rosario Murillo, selon le parquet.
Lors du procès, le frère de Mme Chamorro, Pedro Joaquín Chamorro, et trois anciens employés de la FVBCH ont également été reconnus coupables de blanchiment d'argent et gestion abusive.
"Ils ont tous été déclarés coupables", a dit à l'AFP Olama Hurtado, nièce de Mme Chamorro.
Le parquet a requis une peine allant jusqu'à 13 ans de prison pour Mme Chamorro et les trois ex-employés de la Fondation et le verdict sera rendu public le 21 mars.
Le procès, qui a duré sept jours, s'est tenu sans accès pour la presse ou le public, dans une prison de la police à Managua, connue sous le nom de El Chipote.
- "On s'attend à tout" -
"Quand on prend une position qui met en danger le pouvoir de la dictature, on s'attend à tout, même au pire", avait déclaré fin mai à l'AFP Mme Chamorro, 68 ans. "Le peuple m'a placé en tête des intentions de vote. C'est pourquoi le dictateur leur a ordonné de m'accuser, c'est une vengeance contre le peuple", avait-elle dit.
Cristiana Chamorro, assignée à résidence depuis le 2 juin 2021, était donnée favorite dans les sondages face à Daniel Ortega pour la présidentielle de novembre. Elle est la fille de l'ancienne présidente Violeta Barrios de Chamorro (1990-1997), qui avait battu M. Ortega dans les urnes en 1990.
Son père, le journaliste Pedro Joaquín Chamorro, a été abattu à Managua en janvier 1978 pour s'être opposé à la dictature de Somoza, qui a dirigé le Nicaragua pendant près d'un demi-siècle jusqu'au triomphe de la révolution du Front sandiniste de libération nationale (FSLN) en 1979.
Cristiana Chamorro, journaliste de profession, fait partie des sept candidats à la présidentielle qui ont été arrêtés l'année dernière, en plus de 39 autres opposants, à l'approche du scrutin du 7 novembre à l'issue duquel M. Ortega a remporté un quatrième mandat consécutif.
Une trentaine ont déjà été déclarés coupables, dont 18 ont été condamnés à des peines allant de 8 à 13 années de prison. L'un d'eux, Hugo Torres, un héros de la guérilla sandiniste passé à l'opposition à Daniel Ortega, est mort en détention à l'hôpital en février.
Daniel Ortega, ancien guérillero de 76 ans, est au pouvoir depuis 2007. Son quatrième mandat a été remis en question par la communauté internationale, notamment l'Organisation des Etats américains (OEA), les Etats-Unis et l'Union européenne, au motif que les élections nicaraguayennes n'étaient pas démocratiques.
L.A.Adams--TNT