The National Times - En Asie centrale, la renaissance d'un immense projet soviétique de centrale hydroélectrique

En Asie centrale, la renaissance d'un immense projet soviétique de centrale hydroélectrique


En Asie centrale, la renaissance d'un immense projet soviétique de centrale hydroélectrique
En Asie centrale, la renaissance d'un immense projet soviétique de centrale hydroélectrique / Photo: © AFP

En Asie centrale, pas d'électricité ou d'agriculture sans coopération sur l’eau: après des décennies de rivalités, la construction de l’immense centrale hydroélectrique de Kambar-Ata-1 par le Kirghizstan, le Kazakhstan et l’Ouzbékistan doit assurer la sécurité énergétique et alimentaire de la région.

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Fait notable, ce projet, pensé sous l’URSS, a été relancé sans les deux superpuissances voisines que sont la Russie, allié historique, et la Chine, partenaire d'ordinaire incontournable. Il doit permettre de répondre aux pénuries existantes et aux défis causés par le changement climatique.

Kambar-Ata-1 est "très important pour l’Asie centrale, sa sécurité alimentaire et énergétique", a déclaré fin janvier le ministre kirghiz de l’Energie Taalaïbek Ibraev lors d’une visite sur le futur site du chantier, au milieu des montagnes du Kirghizstan, à laquelle a assisté l’AFP.

Même enthousiasme quelques jours plus tard lors d'une réunion trilatérale. Pour les ministres ouzbek et kazakh, ce projet "apportera de grands avantages à la région" et "assurera à long-terme la stabilité et le développement de l’Asie centrale".

Des déclarations impensables il y a peu, du fait des rivalités entre nations, mais rendues possibles par un réchauffement des relations en raison d'un déficit hydrique et énergétique croissant insurmontable sans coopération.

Mais pour que Kambar-Ata génère de l'électricité à partir des eaux émeraude de la rivière Naryn, il faudra attirer les investisseurs internationaux: au moins 3,5 milliards de dollars sont nécessaires.

Les travaux débutant en 2025 vont durer de longues années, à l'instar de la centrale de Rogoun au Tadjikistan, futur plus haut barrage du monde, dont la mise en service est sans cesse repoussée.

- "Atténuer l'impact du changement climatique" -

L’effondrement économique post-soviétique, la corruption et les conflits avaient tenu à distance les investisseurs et mis un coup d’arrêt aux colossaux projets énergétiques lancé sous l’URSS en Asie centrale, comme Kambar-Ata ou Rogoun.

"La chute de l’Union soviétique a détruit les liens hydriques et énergétiques" entre pays centrasiatiques, explique à l’AFP Rassoul Oumbetaliev, spécialiste kirghiz des questions énergétiques.

Le défunt président ouzbek "Islam Karimov était constamment opposé à Kambar-Ata-1", invoquant le spectre d’une "guerre pour les ressources en eau et en énergie", rappelle l’expert.

Dans le système hérité de l'ère soviétique, le Kirghizstan et le Tadjikistan déficitaires en électricité mais situés en amont des fleuves doivent fournir de l’eau au Kazakhstan, à l’Ouzbékistan et au Turkménistan pour l’agriculture.

En échange, ceux-ci envoient de l’électricité, mais tous s’accusaient de ne pas respecter leurs engagements.

La construction de nouveaux barrages doit résoudre les tensions.

D’après M. Oumbetaliev, "Kambar-Ata revêt une grande importance pour le Kazakhstan et l’Ouzbékistan, qui veulent pendant la saison estivale de l’eau en grande quantité", qui sera accumulée là-bas.

Pour le Kirghizstan, la centrale doit permettre l’export d’électricité vers les pays voisins, voire jusqu'en Afghanistan et au Pakistan. D’autant que le pays utilise d'après la Banque mondiale "moins d’un cinquième de son potentiel hydroélectrique".

Et Kambar-Ata doit pouvoir couvrir le déficit électrique croissant (3,9 milliards de kilowatt-heure en 2024) grâce à sa capacité de production estimée à 5,6 milliards de kilowatt-heure.

Tous savent que les pénuries sont appelés à se multiplier, et le phénomène s'aggravera, selon les experts, du fait du changement climatique.

Selon la Banque eurasiatique de développement, "construire de nouvelles centrales hydroélectriques tout en rénovant celles existantes atténuera l'impact du changement climatique". D'après elle, 2023 a été le "point de bascule" dans la prise de conscience des questions hydriques en Asie centrale.

- Électricité non rentable -

Avec Kambar-Ata-1, qui doit mieux réguler et stocker l'eau, le gouvernement kirghiz attend un effet positif pour les centrales situées en aval.

En premier lieu celle de Toktogoul, qui fournit 40% de l'électricité du Kirghizstan.

Accroché au coeur de la centrale, un immense bas-relief représente Vladimir Lénine avec une citation de 1920 du fondateur de l’URSS : "Le communisme, c'est le pouvoir des Soviets plus l'électrification de tout le pays".

Le communisme a disparu mais l’électrification n’est toujours pas achevée.

Au Kirghizstan, le secteur énergétique n’est pas rentable, vétuste et reste largement subventionné pour contenir les tensions sociales dans un pays à l’économie fragile et prompt à se révolter.

Kambar-Ata doit résoudre l'équation, au moins en partie.

"Aujourd’hui, le tarif auquel nous vendons ne justifie pas les coûts de production d’électricité. Si nous continuons comme ça, dans 5 à 10 ans, nous n’aurons plus d’électricité. Il faut donc construire la centrale", a expliqué le ministre kirghiz de l’Energie.

S.M.Riley--TNT

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