The National Times - Jamestown, berceau historique des Etats-Unis menacé par la montée des eaux

Jamestown, berceau historique des Etats-Unis menacé par la montée des eaux


Jamestown, berceau historique des Etats-Unis menacé par la montée des eaux
Jamestown, berceau historique des Etats-Unis menacé par la montée des eaux / Photo: © AFP

L'eau a encore avancé dans la nuit et immerge désormais l'ancien cimetière de la colonie anglaise de Jamestown, lieu fondateur de la nation américaine. Les pieds humides, les conservateurs du site historique ne peuvent que constater une énième inondation de ce qui fut la première implantation britannique permanente en Amérique du Nord.

Taille du texte:

Un peu plus loin, sur ces rives d'un estuaire de Virginie où a été bâti à partir de 1607 un fort du même nom, une archéologue mène ses fouilles entourée de sacs de sable.

Tous ces vestiges "que nous n'avons pas encore pu étudier pourraient être détruits", s'alarme Michael Lavin, le directeur des collections de Jamestown Rediscovery, l'association en charge du site sur la côte est américaine.

Le 4 mai, le National Trust for historic preservation, importante institution de protection du patrimoine, a placé Jamestown sur sa liste annuelle des onze sites historiques les plus en danger du pays.

Face à la montée du niveau des océans et à l'intensification des dérèglements météorologiques, une course contre la montre est engagée.

- "Il faut agir" -

"Il faut agir, et dès maintenant", insiste Michael Lavin, 47 ans. Pour arriver à son bureau, il a dû passer à gué le chemin, immergé.

"Nous avons presque toujours connu cet endroit à sec", déclare à l'AFP David Givens, le directeur de l'archéologie qui, comme son collègue, travaille ici depuis plus de 20 ans. L'inondation du jour est montée à un mètre, une hauteur d'eau qui sera la norme permanente d'ici la fin du siècle, selon une projection moyenne.

"C'est une illustration parfaite de la montée du niveau des mers, du changement climatique et de comment cela nous affecte", poursuit l'archéologue. Le niveau de la mer à l'embouchure du fleuve James a déjà augmenté de 45 centimètres depuis 1927.

L'inquiétude ici est d'autant plus grande que le site est un concentré de l'histoire américaine: en plus des colons anglais, il a accueilli des tribus amérindiennes pendant 12.000 ans et, en 1619, a vu débarquer dans son port les premiers esclaves africains dans les territoires britanniques d'Amérique du Nord.

- Ossements "comme des éponges" -

Au pied de l'ancienne église, Caitlin Delmas gratte le sol avec sa truelle. Autour de l'archéologue sont installés des sacs de sable et des bâches, déployées à chaque averse. "Ca rajoute du stress, car nous devons faire en sorte que tout reste sec".

Ici, "à peu près partout où on creuse, on trouve quelque chose de passionnant", s'émerveille-t-elle. En 2013, l'étude des os d'une jeune femme retrouvés là a permis d'établir, fait rare, qu'elle a été victime de cannibalisme lors d'une famine subie par les colons pendant l'hiver 1609-1610.

Mais de prochaines découvertes similaires pourraient ne jamais être connues: des ossements mis à jour récemment étaient "comme des éponges", inexploitables en raison d'une trop grande alternance sec-mouillé.

"C'est comme une guerre, avec des sacs de sable et des tranchées", souligne David Givens, "parce que c'est un combat permanent pour nous".

"Au fil du temps, ces sites archéologiques seront inaccessibles, érodés par l'eau de mer et les inondations," ajoute l'archéologue de 53 ans. "Et c'est ce qui me fait le plus peur".

"Les sites culturels ont toujours été affectés par les tempêtes, le vent, la pluie", mais "ces forces accélèrent, s'intensifient, se recombinent" en raison du réchauffement climatique causé par les activités humaines, résume la spécialiste Marcy Rockman, première à s'être penchée sur la question au sein des parc nationaux américains.

Dans le large estuaire face à Jamestown, une poignée de barges transportent des blocs de granite qui attendent une météo plus favorable pour venir renforcer la digue existante, celle-là même construite au début du 20e siècle pour, déjà, protéger le site de l'érosion.

Ce chantier à plus de 2 millions de dollars n'est qu'une première étape: contre les inondations, les études sont lancées, et "ça va coûter des dizaines de millions de dollars" prévient Michael Lavin.

A Jamestown ce jour-là, la marée a facilité la décrue, laissant des carpes barboter au-dessus de l'ancien cimetière jamais vraiment fouillé, bientôt transformé en marécage si rien n'est fait. "Les restes humains sont des collecteurs de données du passé", reprend l'archéologue en chef David Givens. "C'est urgent d'étudier cela".

"Nous n'avons, à Jamestown, qu'une fenêtre de cinq ans pour vraiment limiter les impacts du changement climatique", prévient dans son bureau de Washington Katherine Malone-France, cheffe de la conservation au sein du National Trust for historic preservation.

L.Graham--TNT

En vedette

Colère en Italie après des inondations ayant fait deux disparus

Des habitants d'Emilie-Romagne ont exprimé jeudi leur colère après le passage de la tempête Boris qui a fait deux disparus, accusant les autorités de ne pas avoir pris de mesures préventives malgré les inondations dévastatrices ayant déjà frappé l'an dernier cette région du nord-est de l'Italie.

Leticia, ville colombienne isolée par l'Amazone asséché à la triple frontière avec Pérou et Brésil

"Aujourd'hui l'Amazonie pleure, elle s'assèche", se lamente auprès de l'AFP le maire de Leticia, ville colombienne à la triple frontière avec le Pérou et le Brésil, seulement alimentée par un bras du fleuve géant qui a perdu dix mètres entre juin et août, selon l'Institut colombien d'hydrologie, de météorologie et d'études environnementales (Ideam).

Les constructeurs automobiles européens réclament des "aides urgentes" avant les normes CO2 durcies en 2025

La plupart des constructeurs automobiles européens ont demandé officiellement jeudi à Bruxelles "des mesures d'aide urgentes" pour affronter le durcissement en 2025 des normes d'émissions de CO2 qu'ils s'estiment incapables de respecter, en particulier à cause de l'érosion des ventes de voitures électriques.

Polluants éternels dans l'eau: plusieurs communes au-dessus des seuils réglementaires, selon des médias

L'eau du robinet de plusieurs communes de France présente des taux de polluants éternels (PFAS) au-dessus des normes destinées à entrer en vigueur, selon une enquête des 44 locales de France Bleu et de la cellule investigation de Radio France, diffusée jeudi.

Taille du texte: