Après une année noire, Orpea cherche à redresser la barre
Meilleur accompagnement des résidents et des salariés, stratégie financière repensée sans renoncer aux marges: la nouvelle direction d'Orpea a présenté mardi un plan pour remettre sur les rails le groupe de maisons de retraite privées, à nouveau visé par des perquisitions.
La publication en janvier du livre-enquête "Les Fossoyeurs" a marqué un tournant dans le destin de l'entreprise de 71.000 salariés, dont 26.000 en France. Le journaliste Victor Castanet y dénonçait une maltraitance des résidents, des manquements dans la gestion du personnel et un usage abusif des fonds publics.
Orpea, qui gère plus de 350 établissements en France pour personnes âgées dépendantes, fait depuis l'objet d'une enquête pour maltraitance institutionnelle et infractions financières. Dans ce cadre, des perquisitions ont été lancées mardi "dans toute la France" dans "plusieurs dizaines d'établissements" du groupe et prévues "sur plusieurs jours", selon une source proche du dossier.
Affichant l'ambition de "redevenir l'acteur de référence du secteur", le nouveau directeur général d'Orpea Laurent Guillot a admis que "le chemin" vers la transformation ne serait "pas facile". Il a été nommé en juillet après le scandale.
Pour repartir du bon pied, Orpea compte "fidéliser" ses collaborateurs en investissant dans la formation continue et la promotion interne afin d'assurer une "meilleure qualité" des soins, selon un communiqué.
Le groupe présent dans 23 pays veut aussi revoir sa stratégie immobilière et se désengager de certains pays d'Amérique latine et de Chine, où ses activités sont moins rentables.
Orpea a identifié "un portefeuille d'actifs immobiliers estimé à plus d'un milliard d'euros, prêt à être cédé dès que les conditions de marché le permettront". Il prévoit à terme de détenir en propre 20 à 25% du parc actuel, contre 47% à fin 2021.
"Orpea s'est éloigné de son coeur de métier, en privilégiant un développement international et immobilier trop rapide, au prix d'un endettement excessif et d'une situation financière très fragilisée", a estimé M. Guillot.
La progression du taux d'occupation, une meilleure gestion du personnel mais aussi une politique d'achat et un système informatique plus efficaces devraient permettre d'améliorer la marge. Elle devrait dépasser les 20% en 2025, contre 17% aujourd'hui et 25% l'an dernier.
- Dette massive -
Reste un obstacle financier de taille : le groupe risque de manquer de liquidités "au cours du premier semestre 2023" et ploie sous une dette massive de 9,5 milliards d'euros.
Des négociations ont donc été ouvertes mardi avec les créanciers d'Orpea dans le cadre d'une conciliation devant le tribunal de commerce de Nanterre. Il s'agit de la seconde procédure du genre initiée par le groupe cette année.
La direction souhaite convertir une partie de la dette en capital et lever à nouveau de l'argent frais, de 1,9 à 2,1 milliards d'euros, en dette et en capital.
Cette opération entraînerait une "dilution massive pour les actionnaires existants qui décideraient de ne pas y participer", prévient Orpea, dont l'action a perdu 90% de sa valeur depuis janvier.
Orpea "s'attend à ce que, à l'issue de ces opérations, au moins 20% de son capital social soit détenu par des investisseurs institutionnels français à long terme", a-t-il indiqué sans plus de précision.
Ces derniers jours, la presse évoquait l'entrée au capital de la Caisse des dépôts, le bras financier de l'Etat. La Caisse des dépôts n'a pas exclu l'hypothèse et indiqué lundi à l'AFP qu'elle "examinera le dossier" lorsque "deux conditions" seront remplies: un changement "complet" des pratiques d'Orpea et un bilan "assaini".
Orpea espère réaliser son augmentation de capital en juin prochain, ce qui marquerait la fin du processus de restructuration.
A la Bourse de Paris, le titre du groupe reculait de 4,65% à 7,83 euros mardi en début d'après-midi, dans un marché en hausse.
Du côté des salariés, les syndicats "ont le sentiment que (la nouvelle direction) est à l'écoute", indiquait lundi à l'AFP Dominique Chave, secrétaire général de l'Union fédérale de la santé privée CGT.
H.Davies--TNT