
Françoise Bettencourt Meyers, l'héritière discrète de L'Oréal

Ses apparitions sont rares et sa parole encore plus: Françoise Bettencourt Meyers, héritière de L'Oréal et femme la plus riche de France, prend du champ au sein du géant des cosmétiques et passe le flambeau à ses fils.
"Je ne quitte pas L'Oréal, mais son conseil d'administration", dit-elle dans une déclaration lundi à l'AFP.
Françoise Bettencourt Meyers va céder son siège au conseil d'administration lors de l'assemblée générale des actionnaires mardi. Elle sera remplacée par un représentant de la holding familiale Téthys.
Et elle laissera son poste de vice-présidence de L'Oréal à son fils Jean-Victor, 38 ans, déjà présent au conseil d'administration aux côtés de son deuxième fils Nicolas, 36 ans.
La dirigeante, qui présidera toujours Téthys, le premier actionnaire de L'Oréal, évoque dans sa déclaration à l'AFP un "passage de génération, la quatrième côté famille" avec ses fils.
Françoise Bettencourt Meyers, 71 ans, est la fille unique de Liliane et André Bettencourt et petite-fille unique d'Eugène Schueller fondateur du groupe L'Oréal dont les origines remontent au début du XXe siècle.
Elle était devenue administratrice de L'Oréal en 1997. Depuis, le groupe de cosmétique n'a fait que grandir pour peser désormais plus de 43 milliards d'euros de chiffre d'affaires.
Et Françoise Bettencourt Meyers est devenue la femme la plus riche de France avec une fortune estimée à 75,4 milliards d'euros selon Forbes.
D'une discrétion extrême, elle avait été placée contre son gré sous les feux des projecteurs lors de "l'affaire Bettencourt" qui a abouti à la condamnation du photographe François-Marie Banier en appel en 2016 à quatre ans de prison avec sursis pour abus de faiblesse contre sa mère, Liliane Bettencourt.
Les Bettencourt Meyers, "sont tellement discrets qu'ils ne sont pas connus et donc caricaturés", explique Jean-Claude Le Grand, directeur des relations humaines chez L'Oréal.
Pourtant, la famille a "un rôle actif d'actionnaire et met à la tête du groupe une méritocratie de managers", assure-t-il.
Françoise Bettencourt Meyers "a un attachement viscéral à l'entreprise qui fait qu'elle est très impliquée", assure le directeur général Nicolas Hieronimus.
- "Un couple" -
Cachée derrière de grandes lunettes à larges bords noir, Françoise Bettencourt Meyers, "est quelqu'un qui a de l'humour et part souvent d'un grand éclat de rire", relève Laurence des Cars, directrice du Louvre mais également présidente du jury du prix Liliane Bettencourt pour l'Intelligence de la Main qui récompense les professionnels des métiers d'art.
Et "ce qui frappe c'est que vous êtes face à un couple", ajoute-t-elle.
Françoise Bettencourt Meyers a épousé en 1984 Jean-Pierre Meyers, petit-fils du rabbin Robert Meyers, déporté et décédé avec son épouse à Auschwitz.
Jean-Pierre Meyers a été membre du conseil d'administration de L'Oréal de 1987 à 2020 et vice-président de 1994 à 2020. Il est aujourd'hui directeur général de Tétys, vice-président de la fondation Bettencourt Schueller et président de la fondation pour l'audition, créée avec son épouse.
La fondation Bettencourt Schueller a effectué en 2024 plus de 85 millions d'euros de dons dans les domaines des sciences de la vie, des métiers d'art et de la solidarité.
"Peut-être mes parents auraient-ils préféré que j'épouse un catholique, parce que eux-mêmes l'étaient, mais mon bonheur était le leur", disait Françoise Bettencourt Meyers au Monde en 2012, "cela a modifié mon regard sur l'autre, sur la Bible". Elle est notamment l'autrice d'une étude en cinq volumes intitulée "Regard sur la Bible".
- Tradition -
"Je les sens préoccupés par les fractures dans la société", assure Eric Mestrallet, fondateur d'Espérance banlieues, réseau d'écoles hors contrat soutenu par les Bettencourt Meyers.
Au moment de prendre du recul, Françoise Bettencourt Meyers insiste sur son attachement au groupe et à son avenir. "Nous en sommes les gardiens", selon elle.
"Nous voulons apprécier cette continuité remarquable par respect et fierté pour tous ceux qui ont contribué partout dans le monde. Au fond, pour que presque rien ne change dans cette épopée", dit-elle.
Signe de l'importance des traditions, à chaque naissance chez L'Oréal en France, Françoise Bettencourt Meyers adresse aux parents un petit mot écrit de sa main et une timbale de l'orfèvrerie Christofle.
"Un exemple qui peut apparaître comme paternaliste, désuet" mais "les gens sont très attachés à ce symbole", souligne Jean-Claude Le Grand.
V.Bennett--TNT