Droits de douane: tempête sur les marchés, Trump reste inflexible
La guerre commerciale lancée par Donald Trump, inflexible, fait plonger les marchés boursiers mondiaux lundi, reflétant les craintes de récession, tandis que l'UE tente de s'accorder sur une riposte.
Les Bourses européennes, déjà malmenées jeudi et vendredi, subissent un séisme "historique" selon les analystes: l'indice paneuropéen Eurostoxx 600 chute d'environ 5% à la mi-journée.
En quelques jours, plus de 1.500 milliards d'euros de capitalisation boursière sont partis en fumée en Europe. Pour Berlin, le plongeon boursier est un "signal d'alarme" montrant qu'il n'y a "que des perdants" dans une guerre commerciale dont il s'agit "d'éviter" l'escalade.
Les bourses asiatiques ont aussi connu un lundi noir. A Hong Kong, l'indice Hang Seng s'est effondré de plus de 13% - sa pire séance depuis 1997 - et Taïwan a lâché 9,7%, un record.
Interrogé sur la dégringolade des marchés, qui redoutent une escalade commerciale destructrice pour l'économie, Donald Trump est resté inflexible: "Il faut parfois prendre un traitement pour se soigner", a-t-il déclaré.
Il a avancé que son pays était "beaucoup plus fort" depuis l'annonce de ces mesures et assuré que la chute des marchés n'était pas une volonté délibérée de sa part.
Wall Street, qui a signé vendredi sa pire journée depuis 2020 et effacé quelque 6.000 milliards de dollars de capitalisation en deux séances, s'oriente aussi vers une baisse à l'ouverture.
Le président républicain reproche aux partenaires économiques des Etats-Unis de les "piller". En conséquence, il a imposé un taux universel de 10% de taxe sur tous les produits importés aux Etats-Unis, entré en vigueur samedi.
Ce taux doit être relevé dès mercredi pour plusieurs dizaines de partenaires commerciaux majeurs, notamment l'Union européenne (20%) et la Chine (34%).
La Chine a répliqué en annonçant ses propres droits de douane - 34% de taxes sur les importations américaines. Des contre-mesures qui visent à ramener les Etats-Unis sur "la bonne voie", a avancé lundi Ling Ji, vice-ministre du Commerce. Il a toutefois souligné que la Chine resterait "une terre sûre" pour les investissements étrangers.
- 'Pas de discussion' -
"Nous avons des déficits commerciaux massifs avec la Chine, l'Union européenne et beaucoup d'autres", a écrit dimanche Donald Trump sur son réseau Truth Social.
"La seule manière de régler ce problème, ce sont les droits de douane, qui vont rapporter des dizaines de milliards de dollars aux Etats-Unis", a-t-il ajouté.
M. Trump a assuré avoir discuté pendant le week-end "avec beaucoup d'Européens, d'Asiatiques, au monde entier. Ils veulent tous désespérément un accord".
Les Européens "veulent discuter mais il n'y aura pas de discussion tant qu'ils ne nous donneront pas beaucoup d'argent sur une base annuelle", a-t-il martelé.
Les ministres européens du Commerce extérieur sont lundi au Luxembourg pour "préparer" une réponse commune aux mesures américaines, un "changement de paradigme" auquel l'UE doit s'adapter, selon le commissaire européen en charge du Commerce.
La réponse européenne pourrait être "extrêmement agressive", a jugé le ministre français du Commerce extérieur, Laurent saint-Martin, appelant à n'exclure "aucune option". L'Irlande a mis en garde contre "l'escalade extraordinaire" que constitueraient des représailles ciblant la tech américaine.
"Plus de 50 pays ont approché le gouvernement" américain, a déclaré le ministre des Finances américain Scott Bessent sur la chaîne NBC. "Nous allons voir si ce qu'ils ont à proposer est crédible", a-t-il expliqué. Mais "après 20, 30, 40, 50 ans de mauvais comportements, on ne peut pas repartir de zéro".
"Ce n'est pas le genre de chose que vous pouvez négocier en quelques jours ou quelques semaines", a encore prévenu le ministre, laissant entendre que ces taxes pourraient rester en vigueur plusieurs mois au moins.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu est arrivé à Washington pour évoquer entre autres les nouvelles taxes douanières avec le président américain. Il est le premier dirigeant étranger à rencontrer M. Trump depuis l'annonces des nouveaux droits de douane. Une conférence de presse commune est prévue à 18H30 GMT.
- Possible récession -
La plupart des économistes s'attendent à ce que les nouveaux droits sur les produits importés aux Etats-Unis provoquent une accélération de l'inflation et freinent consommation et croissance.
Le principal conseiller économique de la Maison Blanche, Kevin Hassett, a cependant jugé que ce n'est pas l'économie américaine qui serait la plus affectée par la guerre commerciale.
Il a concédé qu'il pourrait "y avoir des hausses de prix" mais il "ne pense pas qu'on va voir un effet majeur sur les consommateurs aux Etats-Unis", a-t-il insisté.
"Je ne pense pas que l'inflation sera un grand problème", a aussi balayé Donald Trump.
Les marchés financiers envisagent "un choc économique réel négatif massif", voire "un glissement de l'économie américaine vers la récession", a noté Ulrich Leuchtmann, analyste chez la banque allemande Commerzbank.
R.T.Gilbert--TNT