The National Times - Dans une ville du Texas, la vie marquée par la militarisation de la frontière

Dans une ville du Texas, la vie marquée par la militarisation de la frontière


Dans une ville du Texas, la vie marquée par la militarisation de la frontière
Dans une ville du Texas, la vie marquée par la militarisation de la frontière / Photo: © AFP

Troupes armées, barbelés et caméras à l'affût de migrants illégaux marquent, depuis un an, le quotidien des habitants de la ville d'Eagle Pass, au Texas (sud des Etats-Unis), à la frontière mexicaine.

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Alors que le décret récent du président Donald Trump sur une "urgence nationale" à la frontière sud pourrait bientôt entraîner l'envoi de milliers de soldats américains, les déploiements de militaires à Eagle Pass ont déjà été renforcés l'année dernière.

Séparée de la ville mexicaine de Piedras Negras par le fleuve Rio Grande, Eagle Pass a été le sujet de disputes entre le gouverneur républicain du Texas Greg Abbott, allié de Donald Trump, et l'administration de l'ancien président Joe Biden.

Accusant Joe Biden de ne pas avoir protégé le Texas contre une "invasion" de migrants, Greg Abbott a envoyé des troupes de la Garde nationale à Eagle Pass.

Le parc Shelby est le centre de cette activité militaire.

Pendant des décennies, les familles d'Eagle Pass y ont pique-niqué, se sont baignées dans le Rio Grande, où y ont fait du kayak, en bonne entente avec leurs voisins mexicains.

Désormais, d'énormes conteneurs bloquent la vue sur la frontière, où des véhicules blindés soulèvent la poussière brune en patrouillant.

Et sur le Rio Grande circulent des aéroglisseurs sur lesquels des soldats scrutent les rives.

- "Spectacle" -

Pour Jessie Fuentes, un habitant, ces déploiements ne sont qu'un "spectacle" et ont peu d'effets sur l'immigration illégale.

"Que font les soldats, ici ? Si vous les regardez, tout ce qu'ils font, c'est s'asseoir et se tourner les pouces", lâche-t-il.

"Il ne s'agit que d'une zone d'une dizaine de kilomètres de long. Tout le reste est ouvert, donc si (Greg Abbott) pense que cela a fait une différence, il se trompe", ajoute cet homme de 64 ans, dont la famille vit à la frontière depuis "plus de 200 ans".

Samedi, une cinquantaine de soldats envoyés à la frontière après les annonces de Donald Trump se sont arrêtés à San Antonio, à trois heures de la frontière, pour petit-déjeuner. Ils ont été accueillis par des applaudissements des clients.

A Eagle Pass, certains habitants se disent rassurés par l'envoi de militaires voulu par Donald Trump.

Maria Aquado, 25 ans, vit dans un ranch près de la frontière et dit parfois trouver des étrangers dans ses écuries, venus s'abriter pour la nuit avant de continuer vers le nord.

"Je pense que le déploiement de troupes par Donald Trump diminuera l'immigration illégale, et je me sentirai davantage en sécurité dans mon ranch", assure-t-elle.

Le nombre d'interpellations à la frontière mexicaine avait atteint les 250.000 en décembre 2023, mais est descendu à 54.000 en septembre 2024. Une diminution due au durcissement des politiques migratoires de l'administration Biden en cours d'année électorale.

- "Vie meilleure" -

Sur les rives du Rio Grande à Quemado, ville voisine d'Eagle Pass, ouvriers et machines construisent de nouveaux murs frontaliers.

En tant que patron d'une entreprise de kayak sur le fleuve, Jessie Fuentes a été durement touché par la militarisation de la frontière.

En 2023, des bouées ont été installées, destinées à rendre la traversée plus difficile pour les migrants. De nouveaux flotteurs sont apparus cette semaine.

"Maintenant, à la frontière, nous avons non seulement le gouvernement de l'État, mais aussi le gouvernement fédéral qui arrive en force. Beaucoup de gens d'ici sont épuisés et ont peur des répercussions s'ils s'expriment" à ce sujet, explique-t-il.

"Nous n'avons pas besoin de mettre en place des moyens de dissuasion tels que des fils barbelés, des grilles ou des troupes armées", juge-t-il.

Ismael Castillo, 51 ans, pense lui que les migrants peuvent gêner les habitants.

Mais "en fin de compte, ils ne sont pas ici pour faire du mal", dit-il, avant d'ajouter: "Ils veulent une vie meilleure, pour eux et leur famille, et ne restent pas dans les villes frontalières, ils partent généralement vers le nord".

T.Allen--TNT