Vent de panique sur Wall Street, la "tech" dégringole face aux craintes sur l'IA
La Bourse de New York évoluait en ordre dispersé lundi, après une ouverture en forte baisse, les investisseurs remettant en question la domination des géants technologiques américains face à la start-up chinoise DeepSeek, qui a dévoilé la semaine dernière un modèle d'intelligence artificielle (IA) à moindre coût.
Vers 18H10 GMT, l'indice Nasdaq plongeait de 3,45%, l'indice élargi S&P 500 reculait de 1,94%. Le Dow Jones se retournait, prenant 0,11%, après une ouverture en baisse de 0,41%.
La place américaine était prise de court lundi par des informations selon lesquelles l'agent conversationnel de la start-up chinoise DeepSeek serait performant tout en fonctionnant sur des puces à capacité réduite, au risque de bousculer la domination des groupes américains du secteur.
"DeepSeek, qui semble être plus rentable que les alternatives américaines, alimente une ambiance d'aversion au risque", a souligné dans une note Patrick O'Hare, de Briefing.com.
Nvidia, géant américain des semi-conducteurs et première capitalisation mondiale, dévissait de 16,56% à 118,98 dollars, un plongeon entamé dès les tout premiers échanges, avec plus de 500 milliards de dollars de capitalisation envolés.
"Les investisseurs sont déconcertés par cette nouvelle tournure des événements et par (la crainte) que les entreprises américaines spécialisées dans l'IA deviennent moins influentes", a observé auprès de l'AFP Sam Stovall, de CFRA.
Analystes et investisseurs pensaient que l'avance des Etats-Unis dans le secteur des semi-conducteurs, ainsi que leur capacité à limiter l'accès à la Chine à cette technologie, garantirait leur domination en matière d'IA.
Toutefois, DeepSeek, qui vient de détrôner l'outil d'OpenIA, ChatGPT, en termes de téléchargements sur l'App Store (boutique d'applications mobiles d'Apple), a déclaré n'avoir dépensé que 5,6 millions de dollars pour développer son modèle, une somme dérisoire comparée aux milliards investis par les géants américains.
DeepSeek a par ailleurs fait savoir lundi qu'elle subissait une cyberattaque "malveillante à grande échelle" et devait en conséquence limiter temporairement les inscriptions d'utilisateurs.
Elle a précisé que les personnes ayant déjà un compte pourront se connecter comme d'habitude.
Une large partie du secteur des semi-conducteurs était plombée par l'essor de l'outil chinois: Broadcoam plongeait de 18,27%, AMD lâchait 6,37%, Micron décrochait de 12,76% et Marvell Technology glissait de 17,98%.
Les titres du secteur énergétique s'effondraient également à New York, DeepSeek remettant en question les besoins en énergie pour le développement de l'IA. Constellation Energy (-19,36%), Vistra Corp (-28,16%), Talen Energy (-21,88%) et GE Vernova (-21,69%) sombraient.
D'autres géants de la tech, qui ont réalisé d'immenses investissements pour faire leur place dans le secteur de l'IA, étaient aussi en berne, à l'image d'Alphabet (Google) qui lâchait 3,36% ou de Microsoft (-3,37%).
"Les investisseurs essaient de déterminer la manière dont le paysage (…) de l'IA pourrait évoluer, et s'ils doivent réévaluer les valorisations", a commenté M. Stovall. "Ils vont procéder à un examen approfondi de leurs portefeuilles pour vérifier s'ils ne sont pas trop impliqués dans le secteur technologique", a-t-il ajouté.
L'indice VIX - dit "indice de la peur" - qui mesure la nervosité des investisseurs, était en hausse de plus de 26%.
Cet épisode intervient à quelques jours de la publication des résultats de quatre des "Sept Magnifiques", avec Microsoft, Meta et Tesla mercredi, puis Apple jeudi.
Les résultats de cette semaine seront donc suivis de près, a résumé M. Stovall, selon qui le marché portera une attention particulière à Apple qui a "beaucoup été déclassé" par les analystes récemment.
Autre sujet scruté par les investisseurs, la prochaine réunion de la banque centrale américaine (Fed), prévue mardi et mercredi.
La grande majorité des acteurs du marché prévoient un maintien des taux à leur niveau actuel, compris entre 4,25% et 4,50%, selon les données rassemblées par l'outil de veille du groupe CME, FedWatch.
Mais Donald Trump a "exigé" jeudi que les "taux d'intérêt baissent immédiatement" lors d'une allocution en ligne devant un parterre de patrons au Forum économique mondial de Davos, en Suisse.
"Le plus intéressant" lors de la réunion, sera de savoir "ce que le président de la Fed, Jerome Powell, dira en réponse (...) au président Trump et à sa demande de baisse des taux d'intérêt."
Sur le marché obligataire, le rendement des emprunts d'Etat américains à dix ans se détendait nettement, à 4,55% contre 4,62% vendredi en clôture.
S.Arnold--TNT