Assemblée : le RN retire un deuxième texte, dans un hémicycle tendu
Dans un hémicycle sous tension, le RN a retiré jeudi un deuxième texte visant à supprimer ou suspendre les allocations de parents d'enfants délinquants, après un premier revers sur sa proposition de loi contre l'endométriose, dénonçant un "sectarisme" de ses opposants.
"Vous êtes nos meilleurs agents électoraux", a lancé le rapporteur Bryan Masson à la gauche et au camp présidentiel, qui venait de voter avec le groupe Liot pour repousser l'article-clé de son texte.
Un mantra pour les députés d’extrême droite, qui savent que leurs textes ont de fortes chances de ne pas aboutir, mais qui espèrent démontrer auprès de l'opinion le "sectarisme" de leurs opposants, qui les accusent de plagier des idées pour tenter des "coups politiques".
Le texte sur les allocations familiales proposait un mécanisme, à la main du préfet, de suppression ou de suspension des allocations en fonction de la gravité d'un crime ou délit.
Une réponse selon le RN aux émeutes de l'été dernier consécutives à la mort de Nahel, 17 ans, tué fin juin par un policier lors d'un contrôle routier. Seuls les députés LR étaient prêts à le soutenir, arguant que le président de LR, Eric Ciotti, prônait des mesures du même ordre.
Les groupes de la Nupes, ceux du camp présidentiel (Renaissance-MoDem-Horizons) et le groupe Liot se sont tous opposés, comme la ministre des Solidarités Aurore Bergé, qui a fustigé une proposition "inconstitutionnelle", en partie satisfaite, "inopérante mais clairement populiste".
La présidente du groupe RN, Marine Le Pen, a accusé les groupes de ne pas "lire les textes" avant de les voter, et la majorité de se "coucher" devant les groupes de gauche, alors que l'ambiance se tendait dans l'hémicycle.
- "Leçon de rempart" -
Peu avant, c'est Mme Bergé qui reprochait aux députés de gauche d'être "si peu présents dans l’hémicycle" pour contrer le RN.
"Nous n'avons aucune leçon de rempart à l'extrême droite à recevoir", a rétorqué l'écologiste Benjamin Lucas, en soulignant que certains députés MoDem et Horizons avaient applaudi mardi une partie du discours de Mme Le Pen sur la guerre Israël-Hamas, lorsqu'elle s'en prenait à La France insoumise.
Une prise de parole qui a fait bondir le président Renaissance de la commission des Lois, Sacha Houlié, qui l'a accusé, lui et le socialiste Arthur Delaporte, de se comporter en "petites frappes" selon plusieurs députés.
"Ils disent que nous avons applaudi le RN. Mon groupe n'a jamais applaudi le RN", assume M. Houlié auprès de l'AFP, estimant n'avoir pas de "leçon" à recevoir de la gauche.
"Ca montre qu'ils sont à fleur de peau sur le rapport au RN", estime un député Nupes.
Dans la matinée, le RN avait retiré un texte qui prévoyait d'accorder aux quelque 1,5 à 2,5 millions de femmes atteintes d'endométriose un statut spécifique d'affection de longue durée (ALD) "exonérante".
Le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, a appelé à rejeter un texte "ni juridiquement tenable ni opportun", mais aussi "opportuniste".
C'est "une opération politique assez écœurante", a dénoncé Clémentine Autain (LFI), qui avait fait voter début 2022 une résolution sur ce sujet.
Mme Le Pen a vertement rétorqué avoir défendu cette proposition sur l'endométriose "pendant la campagne présidentielle".
Les débats ont aussi régulièrement opposé le groupe RN au groupe LFI. Les RN accusant LFI de bienveillance envers le Hamas palestinien. Les Insoumis multipliant les rappels au règlement pour souligner qu'ils condamnaient les exactions, et renvoyer le RN à l'histoire du Front national, qui comptait parmi ses fondateurs un ancien Waffen-SS.
Le RN a encore au menu des textes sur le prix de l'électricité, contre l'écriture inclusive, pour soutenir les étudiants travailleurs, pour accorder l'asile à Julian Assange ou sur la présomption de majorité pour les mineurs étrangers qui refusent un test osseux.
S'il espère toujours décrocher une première victoire, peu probable malgré le soutien des LR à certains textes, l'essentiel pour lui se joue plutôt en dehors de l'hémicycle.
Dénonçant des "postures mesquines" des autres groupes, le député Jean-Philippe Tanguy a prédit dans l'hémicycle qu'ils seraient "durement sanctionnés" aux européennes l'an prochain.
W.Phillips--TNT