The National Times - Carburants: l'exécutif presse les distributeurs de réduire leurs marges

Carburants: l'exécutif presse les distributeurs de réduire leurs marges


Carburants: l'exécutif presse les distributeurs de réduire leurs marges
Carburants: l'exécutif presse les distributeurs de réduire leurs marges / Photo: © AFP/Archives

A défaut de les convaincre de vendre à perte, le gouvernement va essayer d'obtenir des distributeurs de carburants qu'ils les vendent "à prix coûtant" pour alléger la facture des Français à la pompe, lors d'une réunion mardi à Matignon, même si l'effet d'une telle mesure devrait être très limité.

Taille du texte:

Désireuse de continuer à leur mettre la pression, Elisabeth Borne a menacé devant la majorité à l'Assemblée nationale de "légiférer" en la matière, sans donner plus de détails.

La Première ministre accueille distributeurs, raffineurs, et fédérations professionnelles à 17H30 pour "veiller à la modération des marges" et "demander de multiplier les opérations prix coûtant, sans exclure de légiférer le cas échéant". "Chacun doit prendre sa part", a-t-elle insisté.

Pourtant de l'aveu même des acteurs du secteur, l'impact de la vente à prix coûtant risque d'être "assez marginal", car elle est déjà pratiquée par les enseignes et que la grande distribution vend les carburants avec des marges de "quelques centimes", loin d'annuler la hausse des derniers mois, rappelle Patrice Geoffron, professeur à l'université Paris-Dauphine et directeur de l'équipe énergie-climat.

Évoquant des "marges faibles, 2 centimes en moyenne au litre", le patron de Système U, Dominique Schelcher, a confirmé sur BFMTV-RMC qu'il procèderait par "opérations". "Ca ne peut pas être du prix coûtant permanent".

Emmanuel Macron avait acté dimanche l'abandon de l'idée de vente à perte, rejetée par l'ensemble des distributeurs, et chargé sa Première ministre de réunir "cette semaine" les représentants de la filière.

- Un calendrier -

Cette réunion, au lendemain d'un Conseil de planification écologique, illustre une nouvelle fois la difficulté de l'exécutif à concilier réduction des émissions polluantes et préservation du pouvoir d'achat grevé par la flambée des prix des carburants fossiles.

Sur le pouvoir d'achat, "l'écologie est la réponse", a répondu Emmanuel Macron dimanche. Tout en affirmant: "la bagnole, (...) moi je l'adore".

Lundi, il a défendu une écologie "souveraine", "compétitive" et "juste", promettant également de "reprendre le contrôle" du prix de l'électricité face aux oppositions qui l'accusent de laisser la facture exploser.

L'idée de vente des carburants à perte n'aura donc vécu qu'une semaine après son annonce par la Première ministre, accueillie avec réticence jusqu'au sein de la majorité.

Soucieux de faire oublier au plus vite ce revers, le gouvernement espère un résultat rapide. "Si on trouve un calendrier, des volumes" lors de cette réunion à Matignon, "c'est positif", juge un conseiller ministériel.

Mais "monter le ton" auprès de la grande distribution, réputée coriace dans les négociations, "est d'autant plus efficace que c'est crédible", prévient un autre conseiller.

- "Faire un coup" -

Au-delà de la vente à prix coûtant, Emmanuel Macron a annoncé la reconduction en 2024 de "l'indemnité carburant travailleur", non sans revenir sur quelques promesses. La mesure devrait coûter environ 500 millions d'euros, alors que le gouvernement présente mercredi un budget d'économies visant à désendetter le pays. Cette aide n'a pas convaincu les oppositions, qui dénoncent une "politique du chèque" et réclament en chœur des baisses de taxes.

"Le président de la République a dit +personne ne doit faire de marge+. Alors l'État non plus", a raillé sur LCI le président Les Républicains de la région Hauts-de-France Xavier Bertrand. "C'est l'État, pas le prix du baril qui est responsable", s'est agacé le député RN Julien Odoul sur franceinfo.

Le député Renaissance (ex-LR) Éric Woerth a concédé sur Europe 1 que la majorité "cherchait des idées qui n'impactent pas les finances publiques". "Nous continuerons à tout faire pour protéger le pouvoir d'achat", a assuré Elisabeth Borne.

Au-delà, l'abandon de la vente à perte sonne aussi comme un désaveu du président à l'égard de sa Première ministre, avec laquelle il a déjà connu des frictions. Une ministre évoque "un truc monté pour (contrarier) la Première ministre" mais n'exclut pas non plus que l'exécutif ait "voulu faire un coup en allant vite".

Un cadre de la majorité ne voit pas de dissension entre les deux têtes de l'exécutif car la proposition de vente à perte était "forcément tamponnée par le président".

M.A.Walters--TNT