A Pékin, Yellen prône une "concurrence saine" entre la Chine et les Etats-Unis
La secrétaire américaine au Trésor Janet Yellen a prôné vendredi à Pékin une "concurrence saine" entre la Chine et les Etats-Unis, malgré les tensions commerciales entre les deux premières puissances mondiales.
"Nous souhaitons une concurrence économique saine, pas la loi du plus fort, avec un ensemble de règles équitables, qui puisse bénéficier aux deux pays", a déclaré Mme Yellen lors d'une rencontre avec le Premier ministre Li Qiang, chargé spécifiquement dans son pays des questions économiques.
La secrétaire au Trésor, qui effectue son premier déplacement en Chine depuis sa prise de fonction en 2021, a également appelé à ce que des "désaccords" ne "détériorent" pas les relations entre les deux pays "inutilement".
Ces déclarations surviennent alors que certains responsables politiques américains appellent depuis des mois à réduire la dépendance de Washington envers le géant asiatique, dans un contexte de montée des tensions géopolitiques.
Mme Yellen a préconisé la prudence sur ce point. "Un découplage des deux plus grandes économies du monde serait déstabilisant pour l'économie mondiale", a-t-elle mis en garde face à des responsables d'entreprises américaines.
Le Premier ministre chinois Li Qiang a quant à lui souligné une éclaircie dans les relations entre Pékin et Washington.
"Hier, au moment où vous êtes descendue de l'avion, nous avons aperçu un arc-en-ciel" au-dessus de Pékin, a indiqué Li Qiang à son hôte. "Je pense que ça s'applique également aux relations entre la Chine et les Etats-Unis (...) nous pouvons voir un arc-en-ciel".
- "Eviter les erreurs" -
Cette visite s'inscrit quelques semaines après celle du secrétaire d'Etat Antony Blinken, dans une volonté de l'administration Biden de renouer les contacts physiques avec Pékin, après trois ans d'isolement presque total de la Chine en raison de la crise sanitaire.
"Dans l'administration Biden, Mme Yellen semble être plus pragmatique" que d'autres, souligne auprès de l'AFP Tao Wenzhao, membre de l'Académie chinoise des sciences sociales.
"Sa visite est bienvenue, et d'un point de vue pratique, cela devrait permettre aux deux parties de se rapprocher", estime-t-il.
"Je pense que nous sommes en train de remodeler, reconstruire les relations sino-américaines", affirme M. Tao.
Dans la matinée, la secrétaire américaine au Trésor a déjà pu avoir une "réelle conversation" avec son ancien homologue, l'ex-vice-Premier ministre Liu He, ainsi que le gouverneur sortant de la banque centrale chinoise, Yi Gang, selon un fonctionnaire du Trésor.
"Ils ont discuté des perspectives économiques mondiales et respectivement de celles des Etats-Unis et de la Chine", a ajouté cette source.
Ce fonctionnaire du Trésor a averti jeudi que les Etats-Unis ne s'attendaient pas à des avancées spécifiques au cours de cette visite mais qu'ils espéraient des échanges constructifs susceptibles d'ouvrir la voie à des discussions plus concrètes.
"Ce voyage est l'occasion de communiquer et d'éviter les erreurs de communication ou les malentendus", a plaidé jeudi Mme Yellen.
- Enquêtes et perquisitions -
Le principal point de friction concerne les semi-conducteurs, avec l'imposition ces derniers mois de restrictions pour couper l'approvisionnement des entreprises chinoises en technologies américaines, notamment des puces.
La Chine, qui cherche à devenir autonome dans ce domaine, estime que ces mesures visent à entraver son développement et maintenir la suprématie américaine.
Lundi, Pékin a annoncé des restrictions sur les exportations de deux métaux indispensables aux semi-conducteurs et dont elle est le principal producteur. Une mesure largement perçue comme des représailles aux pressions américaines.
"Je suis préoccupée par les nouveaux contrôles à l'exportation récemment annoncés par la Chine (...) Nous sommes en train d'évaluer l'impact de ces mesures", a réagi vendredi Mme Yellen auprès de responsables d'entreprises américaines.
Ces derniers s'inquiètent de plus en plus du climat d'affaires dans le pays, après des perquisitions et enquêtes lancées ces derniers mois à l'encontre de certaines d'entre elles.
Paradoxalement, depuis la levée des restrictions sanitaires en début d'année, les grands patrons américains sont nombreux à se rendre en Chine, à l'image du directeur général d'Apple Tim Cook ou du fondateur de Microsoft Bill Gates.
Ce dernier avait même eu le suprême honneur d'être reçu par le président chinois Xi Jinping, en tant que co-président de la fondation philanthropique Bill et Melinda Gates.
Elon Musk avait lui rencontré de hauts dirigeants, avant de se rendre à Shanghai pour visiter le site d'assemblage d'une gigantesque usine inaugurée par Tesla en 2019.
S.Mitchell--TNT