Casino: les offres d'argent frais attendues, pour un avenir clarifié fin juillet
Les prétendants au sauvetage ou à la reprise de Casino ont jusqu'à lundi soir pour soumettre leurs offres d'argent frais, et l'avenir du distributeur français lourdement endetté pourrait être tranché d'ici à la fin juillet.
Recapitalisation, crainte d'une découpe... Le sort du groupe stéphanois et de ses enseignes Monoprix, Franprix ou Cdiscount ne sera pas scellé avant plusieurs semaines, le temps d'examiner les arguments financiers présentés.
Casino, qui emploie plus de 200.000 personnes dans le monde dont un gros quart en France, affichait une dette nette de quelque 6,4 milliards d'euros fin 2022 (dont 4,5 milliards sur l'activité France) et a urgemment besoin d'argent nouveau.
Le groupe a fait progresser son chiffre d'affaires à 33,6 milliards d'euros en 2022 grâce à l'inflation, mais a affiché une perte nette de 316 millions et cédé beaucoup de parts de marché.
Quelle que soit la partition jouée, un changement d'ère se profile: Rallye, la maison mère endettée de quelque 3 milliards d'euros, "perdra le contrôle de Casino", a indiqué le distributeur mercredi, mettant ainsi fin à la mainmise du patron historique Jean-Charles Naouri.
Casino attire des prétendants, et ce malgré l'abîme financier et les performances. Mais tous n'ont pas forcément les mêmes ambitions, certain(s) étant potentiellement intéressés par l'emplacement de magasins, moins par l'avenir de l'enseigne née il y a 125 ans.
Plusieurs milliardaires ont manifesté leur intérêt publiquement.
Le Tchèque Daniel Kretinsky, déjà actionnaire de Casino à plus de 10% et qui souhaite en prendre le contrôle, est prêt à injecter 750 millions d'euros. A condition que la dette soit allégée, avec une augmentation de capital de plus d'un milliard d'euros à laquelle souscrirait à hauteur de 150 millions d'euros Marc Ladreit de Lacharrière (Fimalac), actionnaire lui aussi (12% du capital) et proche du PDG Naouri.
De son côté, le trio d'hommes d'affaires Xavier Niel (Free), Matthieu Pigasse et Moez-Alexandre Zouari s'est dit potentiellement prêt à investir jusqu'à 300 millions d'euros dans le cadre d'"un renforcement des fonds propres (avec d'autres acteurs) allant jusqu'à 1,1 milliard d'euros".
Dans le secteur de la grande distribution, Intermarché pourrait aider lui aussi à recapitaliser son concurrent, tandis qu'au moins un autre acteur lorgnerait le dossier.
Les syndicats, qui ont lancé une procédure de droit d'alerte économique pour en savoir plus sur la situation du groupe, s'inquiètent notamment d'une vente à la découpe et d'un transfert de magasins supplémentaires à Intermarché (119 sont déjà prévus), un groupement d'indépendants où la politique sociale dépend de chaque patron de magasin.
- Objectif: boucler fin juillet -
Casino est entré fin mai en procédure de renégociation de sa dette sous l'égide du Tribunal de commerce de Paris. Il a quatre mois pour conclure mais espère "finaliser un accord de principe sur les termes de la restructuration financière d'ici le 27 juillet", a-t-il indiqué mercredi.
Il souhaite une conversion massive de sa dette en capital, portant sur plus de 3 milliards d'euros de dettes non-sécurisées et entre 1 milliard et 1,5 milliard d'euros de dettes sécurisées. Les détenteurs de ces créances (grandes banques, fonds, institutionnels...) deviendraient ainsi des actionnaires de Casino plutôt que de récupérer leur argent.
Le groupe veut aussi pouvoir au moins préserver l'activité en France.
Il espère une augmentation de capital "d'au moins 900 millions d'euros", pour avoir les "liquidités adéquates" permettant de mener à bien son plan stratégique 2023-25.
Après des négociations avortées avec Teract, une jeune entité fondée par le trio Niel-Pigasse-Zouari dans le giron du mastodonte de l'agro-industrie InVivo, Casino a changé son fusil d'épaule: il vient d'annoncer un rapprochement avec Prosol (pôle fruits, légumes, poissonnerie et crémerie de l'enseigne Grand Frais), dont il veut importer le concept à succès en matière de produits frais. Un partenariat censé être mis en œuvre "au plus tard le 24 juillet 2023", une fois conclus des "accords de principe".
A la Bourse de Paris, l'action Casino, qui tutoyait les 80 euros au milieu des années 2010, a atteint jeudi dernier son plus bas niveau historique en séance, à quelque 5 euros.
J.Sharp--TNT