Pascal Praud, de "L'heure des pros" à l'heure du choix
Réac de café du commerce pour les uns, porte-voix du bon sens populaire pour les autres, Pascal Praud va-t-il passer à 100% dans l'empire Bolloré? Figure de proue de CNews, la télé du milliardaire, l'animateur pourrait aussi rejoindre sa radio, Europe 1.
Pour l'instant, il a un pied dans un groupe et le deuxième dans un autre. Présentateur de l'émission de débats "L'heure des pros" sur CNews depuis 2016, il officie par ailleurs sur RTL (groupe M6).
Depuis des mois, la presse l'annonce en partance pour Europe 1, radio du groupe Lagardère, qui vient d'être avalé par Vivendi, groupe de Vincent Bolloré.
Pas confirmée à ce stade, l'arrivée de Praud serait un moyen de pousser le rapprochement entre Europe 1 et CNews, qui partagent déjà plusieurs têtes d'affiche, comme Laurence Ferrari et Sonia Mabrouk.
Récemment, L'Obs et Télérama ont affirmé qu'il avait reçu une contre-offre de M6 pour le faire venir sur cette chaîne de télé tout en restant sur RTL.
Sollicité par l'AFP, l'intéressé n'a pas souhaité faire de commentaire sur son avenir.
Mais à RTL, certains semblent s'être faits à l'idée d'un départ. "RTL, ça lui donnait un vernis, tandis que chez CNews et Europe 1, il va être enfermé dans son image", glisse-t-on dans les couloirs de la radio du groupe M6.
- "Bateleur" -
Dans "L'heure des pros", Pascal Praud, 58 ans, mène des débats sur des sujets d'actualité, entouré de chroniqueurs. Beaucoup sont marqués très à droite (les anciens magistrats Georges Fenech et Philippe Bilger, la journaliste Charlotte d'Ornellas), d'autres à gauche (le journaliste Laurent Joffrin).
Cheveux blancs et barbe finement taillée, costumes élégants et lunettes sur le nez, le maître de cérémonie fait le show, quitte parfois à surjouer l'emportement.
"C'est un vrai bateleur, ultra-cultivé, qui peut parler de n'importe quel sujet", décrit à l'AFP un journaliste qui l'a côtoyé bien avant qu'il présente "L'heure des pros".
Comme l'ensemble de CNews (chaîne du groupe Canal+, contrôlé par Vivendi), l'émission est accusée à gauche de promouvoir les idées conservatrices qu'on prête à Vincent Bolloré.
En avril, la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, avait refusé de répondre à CNews lors d'une manifestation contre la réforme des retraites.
Mi-mai, la secrétaire nationale d'Europe Ecologie Les Verts (EELV), Marine Tondelier, avait qualifié la chaîne de "média réactionnaire et d'extrême droite". Pascal Praud avait dénoncé une "caricature".
- Succès public -
"Qu'on pense que je suis d'extrême droite, c'est dingue!", assurait l'animateur en 2021 au journal Le Parisien/Aujourd'hui en France.
Il se disait "hyperconservateur sur la culture, l'histoire, l'autorité et la sécurité", "très progressiste sur les sujets de société" (mariage pour tous, PMA, GPA) et "libéral" sur le plan économique.
En février, le président de l'Arcom (le régulateur des médias), Roch-Olivier Maistre, a indiqué que CNews "respect(ait) strictement le pluralisme politique" de façon globale, tout en jugeant qu'elle "se rapproche d'une chaîne d'opinion" à la manière de la télé conservatrice américaine Fox News.
Selon lui, le fait que des "éditorialistes" défendent des "opinions" dans des "émissions de plateau" relève de la "liberté éditoriale" de la chaîne.
Quoi qu'il en soit, "L'heure des pros" (diffusée deux fois par jour) séduit le public: elle rassemble autour de 400.000 téléspectateurs le matin et 600.000 le soir.
Ses fidèles louent la "liberté de ton" de l'émission, son côté populaire et le fait qu'elle aborde tous les sujets, même les plus polémiques.
Avant de devenir l'homme fort de CNews, Praud a longtemps été journaliste sportif, notamment dans "Téléfoot" sur TF1.
De 2008 à 2010, il a été directeur général du FC Nantes, club de sa ville d'origine, dont il est un supporter.
"Ses relations avec la presse sportive nantaise étaient tendues", se souvient un journaliste local. "Il lisait tout et avait le coup de fil facile pour se plaindre d'un article, ce qui est paradoxal pour un journaliste".
T.Bailey--TNT