The National Times - Apprendre à nager, une occasion trop rare pour les enfants atteints d'un handicap mental

Apprendre à nager, une occasion trop rare pour les enfants atteints d'un handicap mental


Apprendre à nager, une occasion trop rare pour les enfants atteints d'un handicap mental
Apprendre à nager, une occasion trop rare pour les enfants atteints d'un handicap mental / Photo: © AFP/Archives

"Il adore l'eau mais n'en fait qu'à sa tête, c'est un grand stress pour moi !" Pour les enfants atteints d'un handicap mental, il est souvent difficile, voire impossible d'apprendre à nager sans une organisation adaptée et un engagement des parents.

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En France, les noyades accidentelles sont responsables tous les ans d’environ 1.000 décès, presque la moitié pendant la période estivale. Les ministères des Sports et de la Santé ont relayé récemment leurs messages de prévention avant l'été, centrés cette année sur la vigilance des parents auprès des jeunes enfants.

Parmi les "gestes simples" préconisés, l'apprentissage de la nage et la familiarisation à l'aisance aquatique dès le plus jeune âge. Mais quand son enfant est atteint d'un handicap, ce conseil de bon sens peut se révéler un véritable parcours du combattant.

"Quand vous voulez que votre enfant apprenne à nager mais que vous le mettez en cours avec d'autres jeunes, c'est là que les problèmes commencent", témoigne Renato Castellani, membre du conseil d'administration de l’Unapei (association représentant des personnes avec handicap intellectuel) et président d'un club de sport adapté en Moselle.

Pour changer la donne, il s'est "battu pendant un an" pour obtenir un créneau à la piscine de Sarreguemines dédié à l'apprentissage de la nage pour ces jeunes à besoin particulier, avec un moniteur de natation qui s'est "formé sur le tas".

- Créneau dédié -

Mais, selon les lieux d'habitation, tous les jeunes n'ont pas accès à des cours spécifiques, reconnaît Aurélie Charasse, conseillère technique nationale auprès de la Fédération française du sport adapté.

Pour multiplier les possibilités, "on essaye de mettre en place des formations en direction des profs de natation, mais ils ne connaissent pas bien ce public et peuvent être parfois un peu réticents", relève-t-elle. "Et pour les demandes de créneaux dans les piscines, on arrive souvent en fin de peloton".

Quand les clubs ou les piscines ne proposent pas de solutions, ce sont les familles qui en cherchent, comme souvent quand il s'agit de handicap.

A Paris, l'association SASEP (Sport Adapté du Sud-Est de Paris), animée et administrée par des parents d'enfants porteurs de handicaps mentaux ou cognitifs, propose depuis 1995 un créneau dédié d'une heure trente tous les samedis matin à la piscine de la Butte-aux-Cailles, dans le 13e.

Cette semaine, Rayan, 9 ans, autiste, venait tester une première séance. "Comme il adore l'eau, il se jette n'importe où, que ce soit dans la mer ou une piscine", témoigne sa mère, Habiba Chihi. "Cela me rassurerait vraiment qu'il sache nager mais, dans les autres piscines, on ne l'a pas accepté pour des cours".

- "Passer par le jeu" -

Karima et son fils Ilias, 14 ans, atteint de trisomie 21 et d'un trouble du spectre autistique, se lèvent chaque samedi à 6h30, depuis les 8 ans de l'enfant, pour cette séance hebdomadaire qu'il attend avec impatience.

"Nous habitons à Noisy-le-Sec, en Seine-Saint-Denis, et près de chez nous, il n'y a aucune structure permettant un apprentissage adapté", raconte cette mère, rassurée de voir maintenant son fils "se débrouiller dans l'eau".

L'association emploie six salariés, dont des maîtres nageurs formés aux besoins de ces enfants et des psychomotriciens, qui les accompagnent dans l'eau.

"Il faut être très patient, toujours clair dans les consignes, varier les exercices et s'adapter aux difficultés de chacun", énonce Clémence Lacas, maître nageuse titulaire d'un master d'activité physique adaptée.

Les parents peuvent suivre les jeunes dans l'eau, en relayant les consignes. "On essaye d'avoir un accompagnant par enfant et de beaucoup passer par le jeu, avec du matériel adapté, comme des boudins ou tapis en mousse, pour permettre à chacun d'être en confiance", explique Solène Rutily, psychomotricienne.

Mais tous les enfants ne peuvent pas prétendre à ces cours sur mesure: "chaque année on doit refuser du monde", regrette le président de la SASEP, Nicolas Chateauneuf. Un crève-coeur, tant les progrès sont parfois "spectaculaires". Certains jeunes atteignent même un niveau compétition.

K.M.Thompson--TNT