Réfugiés: vague d'indignation après la démission du maire de Saint-Brévin
La démission de Yannick Morez (DVD), le maire de Saint-Brévin-les-Pins où un projet de transfert d'un centre d'accueil de demandeurs d'asile (Cada) déjà installé sur la commune depuis sept ans, a provoqué jeudi une vague d'indignation, la première ministre Elisabeth Borne promettant de "mieux protéger les élus".
Yannick Morez a annoncé mercredi soir, sur Facebook, avoir adressé sa demande de démission au préfet, évoquant notamment des "raisons personnelles".
Son domicile familial avait été la cible d'un incendie criminel dans la nuit du 22 mars. Deux véhicules avaient été détruits et une partie de la maison endommagée, sans faire de blessé.
"J'ai pris cette décision pour des raisons personnelles, notamment suite à l'incendie criminel perpétré à mon domicile et au manque de soutien de l'Etat, et après une longue réflexion menée avec ma famille", explique Yannick Morez.
"Ce qui s'est produit est très choquant et je voudrais assurer le maire de tout mon soutien", a déclaré jeudi la Première ministre depuis la Réunion.
Élisabeth Borne a aussi exprimé sa volonté de "mieux protéger les maires", proposant à M. Morez de le recevoir "la semaine prochaine".
Emmanuel Macron a également dit sa "solidarité" avec le maire démissionnaire après des attaques "indignes".
M. Morez était maire depuis six ans, après neuf années auparavant comme conseiller municipal. Il avait demandé sans succès à la préfecture d'interdire les dernières manifestations à Saint-Brévin, le 29 avril. Ces manifestations, "comme malheureusement indiqué préalablement, ont entraîné des troubles, violences, dégradations et scènes de guerilla urbaine", écrivait M. Morez au préfet au lendemain des faits dans une lettre publiée sur la page FB de la ville, station balnéaire de Loire-Atlantique.
"Les Brévinois sont lassés de subir des affrontements aussi extrêmes (...) et que l'Etat ne fasse rien pour y mettre fin", ajoutait M. Morez.
- "Une bataille qui nous dépasse" -
Dans un entretien le 21 mars avec l'AFP, le maire avait déclaré: "L'Etat nous laisse seul en première ligne avec ce centre, même si c'est lui qui décide du projet de déménagement (...) On est au milieu d'une bataille qui nous dépasse (...) C'est piloté de l'extérieur (...) C'est une opposition purement idéologique".
Saint-Brévin-les-Pins est, depuis plusieurs mois, le centre de tensions consécutives à un projet de déplacer près d'une école élémentaire le Cada, ouvert dans la station balnéaire en 2016 après le démantèlement de la "jungle de Calais".
Plusieurs manifestations contre ce projet, provoquant à chaque fois des contre-manifestations, y ont été organisées à l'appel de l'extrême droite, en particulier de la mouvance de Reconquête, le parti d'Eric Zemmour. Bernard Germain, un candidat de Reconquête aux législatives de 2022 dans les Côtes d'Armor, figurait parmi les intervenants de la dernière manifestation, fin avril.
M. Germain était le porte-parole d'un comité hostile à un projet de centre d'accueil pour réfugiés en situation régulière à Callac (Côtes d'Armor).
Face aux pressions de l'extrême droite, qui y avait organisé au moins deux manifestations suscitant également des contre-manifestations, la municipalité de Callac avait finalement renoncé en janvier à ce projet, porté par une fondation privée, contrairement à Saint-Brévin où le projet contesté est porté par l'Etat. Le parti d'Eric Zemmour s'était réjoui de cette "victoire".
Le maire de Saint-Brévin avait rappelé auprès de l'AFP que 400 demandeurs d'asile ont été au total accueillis sur la commune depuis l'ouverture du Cada il y a sept ans. Et, soulignait-il, "il n'y a jamais eu le moindre souci".
De nombreuses voix se sont élevées depuis que cette démission a été rendue publique. "L'Assemblée nationale se lève en hommage à Yannick Morez, maire de Saint-Brevin-les-Pins, qui vient de démissionner après l'incendie de son domicile et des menaces de l'extrême droite. Mais les députés du Front national restent assis. La honte", a rapporté sur Twitter le coordinateur de la France insoumise Manuel Bompard.
De son côté, Marine Le Pen a tweeté jeudi matin: "Les agressions et intimidations à l'égard des élus sont inadmissibles! En politique, les désaccords politiques se règlent dans les urnes ou devant les tribunaux".
"Inacceptable. Les violences, les menaces envers les élus doivent être le combat de tous", a pour sa part réagi sur le même réseau social la secrétaire d'Etat chargée de la jeunesse et élue (Modem) nantaise, Sarah El Haïry.
L.Johnson--TNT