Retraites: des députés LR contre une réforme "floue" et "pas juste"
Ils sont minoritaires chez Les Républicains mais détiennent une clé de la réforme des retraites: plusieurs députés de circonscriptions rurales, inquiets des retours de terrain, s'apprêtent à voter contre, jeudi, et expliquent pourquoi.
"Sur le terrain personne ne me dit +allez-y monsieur le député, votez cette réforme elle est bonne pour le pays!+", affirme Pierre Cordier.
"Dans les Ardennes, beaucoup de gens travaillent dans la métallurgie, la fonderie, avec des conditions climatiques difficiles quand on travaille dehors", explique-t-il.
"Les gens me disent qu'ils sont usés à 57 ou 58 ans", ajoute l'élu, selon qui le texte "n'apporte pas assez de garanties" et "ne prend pas en compte la pénibilité. Les femmes sont désavantagées et on n’a pas envisagé toutes les solutions sur le temps de travail hebdomadaire, la fin de carrière en douceur..."
Enfin, "ce ne sont pas les députés LR qui vont faire l’appoint de gouvernement!", s'insurge-t-il.
"C'est une réforme floue, et qui arrive à un très très mauvais moment", abonde Jean-Yves Bony, élu du Cantal, "un département populaire où les gens sont pénalisés".
"Ils souffrent, ils ne sont pas prêts à être conciliants sur cette réforme", car "quand on travaille dur, la reconnaissance de ce travail c’est la retraite. Pouvoir partir plus tôt doit être pris en compte", ajoute le député qui ne craint pas de se mettre en porte-à-faux avec sa famille politique, qui reste majoritairement favorable à la réforme.
"La famille, faut l'écouter aussi", assure-t-il en allusion à l'opposition que suscite la réforme à droite. Et, en cas de 49.3 pour faire passer la réforme sans vote, "ça ne me gênerait pas de voter une motion de censure qui viendrait de Liot", un groupe de députés indépendants, assure M. Bony.
"A un moment la démocratie est complètement dévoyée. Il faut réagir". Quant au risque de dissolution, "je n’ai pas peur d’aller devant les électeurs. J’estime avoir une légitimité".
- Réforme "inaudible" -
Député de Côte d'Or, Hubert Brigand votera contre à cause de "la façon dont le gouvernement a amené cette loi", d'un texte "qui n'est pas juste" et d'"une série de mensonges" selon lui notamment sur les petites pensions.
"En milieu rural où on vous supprime tout, cette réforme est inaudible. Ici (à Paris) c'est l'opulence, l'emploi, l'activité alors que chez nous les gens partent. Le gouvernement ne l’a pas senti", affirme-t-il, en rappelant que la semaine dernière "à Montbard, commune de 5.000 habitants, il y a eu 2.000 manifestants".
Quant au hiatus avec son propre groupe, "je suis ici pour défendre mon territoire et pas pour suivre obligatoirement les consignes du groupe".
"Elle est injuste cette réforme", affirme le député de Corrèze Francis Dubois, certes partisan d'une réforme mais "tenant compte des années de cotisation", et "pas sur un projet de loi de finances".
Il assure qu'il ne changera pas son vote même si des avancées sont obtenues sur les carrières longues en commission mixte paritaire mercredi: "les choses ne sont pas suffisamment claires".
"Et puis on n'a pas pu discuter. Si on se prend un 49.3 à la sortie, nous les députés on sert à quoi? Il faut que le gouvernement ait le courage politique de passer au vote".
S.Collins--TNT