La Française Anouk Ricard remporte le grand prix de la BD du festival d'Angoulême
Le grand prix de la bande dessinée d'Angoulême, référence mondiale pour le 9e art, a été décerné mercredi à la Française Anouk Ricard pour son oeuvre burlesque mettant en scène des animaux très humains.
Cette autrice et dessinatrice de 54 ans, élue par un panel d'auteurs de BD publiés en français, succède à la Britannique Posy Simmonds et devient la cinquième autrice sacrée depuis la création de ce prix, qui récompense depuis 1974 les grands noms de la bande dessinée (Franquin, Art Spiegelman, Riad Sattouf...).
En recevant son prix, la lauréate, visiblement très émue, a évoqué un "immense honneur" et fait part de "sa joie" et de "sa fierté".
C'est la première fois dans l'histoire du festival international de la BD d'Angoulême (sud-ouest de la France), dont la 52e édition ouvre ses portes au public jeudi, que le grand prix est attribué deux années de suite à une autrice.
"Il y a une évolution et c'est tant mieux", a salué Anouk Ricard, ajoutant: "On a toutes notre place dans la BD".
Cette dessinatrice, qui s'est d'abord fait connaître dans l'édition jeunesse avec sa série "Anna et Froga", était en lice face à sa compatriote Catherine Meurisse, autrice éprise de philosophie, et l'Américaine Alison Bechdel, figure de la contre-culture LGBT.
Adepte d'un trait quasi enfantin et de couleurs vives, cette autrice formée à l'école des arts décoratifs de Strasbourg (est de la France) met souvent en scène des animaux anthropomorphiques dans des situations où le burlesque le dispute à l'absurde, notamment lorsqu’elle revisite des faits divers piochés dans la presse régionale ("Faits divers" 1 et 2).
Son humour décalé lui permet également de brocarder le monde du travail dans "Coucous Bouzon" (2011), dans lequel un canard est recruté par une entreprise d'horlogerie ubuesque, et de moquer les "toutologues", les personnes capables de disserter sur tout et n'importe quoi ("Les Experts, (en tout)").
- Espagne et Superman -
La remise du grand prix marque l'ouverture officielle du festival d'Angoulême qui consacre cette année une très riche exposition aux "1.001 vies" de Superman, accorde de nouveau une large place aux mangas et met le cap sur l'illustration espagnole.
Présent à la remise de prix, le ministre espagnol de la Culture a salué une "opportunité historique" pour son pays. "La plupart des pays regardent Angoulême comme le point central du dialogue autour de la bande dessinée", a déclaré Ernest Urtasun.
Une exposition de planches originales et de carnets est également consacrée à Posy Simmonds, 79 ans, ancienne dessinatrice pour le quotidien The Guardian, qui s'est dite "fière" que son travail orne les murs du musée d'Angoulême.
"J'ai majoritairement travaillé pour la presse et mes dessins étaient éphémères, pas pour exposer. Quelquefois, c'était fait à toute vitesse, il y avait des traces de Tipp-Ex, de café et même de sang", a-t-elle plaisanté.
Samedi soir, un autre temps fort est attendu avec la remise du Fauve d'or du meilleur album. Un jury présidé par la comédienne et metteure en scène française Zabou Breitman devra départager 44 titres en compétition.
Comme souvent à Angoulême, une polémique a accompagné l'édition 2025.
Parue la semaine dernière, une enquête de l'Humanité magazine accuse la société organisatrice 9e Art+ de dérive financière, de management brutal et d'avoir limogé une salariée après qu'elle a porté des accusations de viol en 2024.
L'organisation avait rejeté la semaine dernière des "accusations infondées" mais la polémique "secoue beaucoup de gens en interne (...) et d'auteurs", a indiqué mercredi à l'AFP une source au sein du Festival.
Le Syndicat national de l'édition français a qualifié mercredi les faits relatés par la presse d'"extrêmement graves", en appelant "instamment" au lancement d'un appel d'offres pour confier l'organisation du festival à une autre structure.
Dans le quotidien régional Charente Libre, le délégué général du Festival et président-fondateur de 9e Art+, Franck Bondoux, a estimé que le licenciement de la salariée en 2024 était "purement lié à son attitude dans le cadre professionnel".
A.M.Murray--TNT