La SNCF victime de son succès et de la pénurie de trains
"On est bien à l'âge d'or du train": la SNCF a enregistré de nouveaux records de fréquentation en 2023 mais se heurte au manque de trains pour répondre à l'explosion de la demande.
L'année 2023 est synonyme de performance historique pour la SNCF, après une année 2022 déjà inédite pour le groupe ferroviaire.
Le TGV a transporté 122 millions de voyageurs, un niveau encore jamais atteint et en progression de 4% par rapport à 2022, selon des chiffres annoncés vendredi.
La grande vitesse n'est pas la seule à surfer sur l'emballement pour le transport ferroviaire: les trains régionaux progressent aussi de 8%.
Par rapport à l'avant-Covid, la fréquentation dans les TER a bondi de 21% avec des pics dans certaines régions, comme en Occitanie, où le nombre de voyageurs a augmenté de 40% en quatre ans.
"On est bien à l'âge d'or du train. On est en train de construire un cercle vertueux du ferroviaire", s'est réjoui le PDG de la compagnie SNCF Voyageurs, Christophe Fanichet.
L'entreprise aux 66.000 salariés recrute, ses effectifs augmenteront en 2024 comme en 2023 après de longues années de régression, et elle affiche une belle attractivité puisqu'elle dit avoir reçu 250.000 CV en 2023 pour 4.900 recrutements - même si dans le même temps les démissions ont elles aussi augmenté.
- Saturation -
Pour autant, "cette croissance a été limitée par des effets de saturation", a déploré Christophe Fanichet. En d'autres termes, avec seulement 364 rames TGV, SNCF Voyageurs ne dispose pas de suffisamment de trains pour répondre à la demande grandissante.
En dix ans, la compagnie a perdu 105 rames, mises au rebut alors que le TGV traversait une crise de rentabilité, même si l'offre de places a augmenté de 13% dans le même temps grâce à l'arrivée des TGV Duplex, qui ont plus de sièges.
"Un TGV sur trois a circulé complet l'an dernier", a précisé le patron de SNCF Voyageurs, et c'est même le cas de 60% des Ouigo, ces TGV low-cost à classe unique, sans voiture bar et sans remboursement possible.
Et la compagnie dispose de peu de solutions à court terme pour remédier au problème. La SNCF a commandé 115 TGV-M nouvelles générations, de plus grande capacité, mais dont les premiers exemplaires ne seront livrés qu'en 2025, puis à un rythme de 12 par an.
"Je suis agacé qu'on attende les TGV-M" construits par Alstom et qui ont déjà pris du retard, a regretté Christophe Fanichet. "Si j'avais plus de trains, je pourrais emmener plus de voyageurs", a-t-il poursuivi.
Pour le moment, la SNCF envisage plusieurs alternatives pour emmener plus de monde. D'abord, un programme de prolongation de la durée de vie d'une centaine de rames, de deux à dix ans.
Ensuite, la montée en puissance de Ouigo, dont les trains proposent une centaine de places en plus par rapport aux TGV InOui.
- Pas de miracle -
Actuellement, 38 rames Ouigo sont en circulation. Elles seront 50 début 2027. "Sur le mix TGV InOui versus Ouigo, on va aller pas à pas vers entre un TGV sur cinq et un TGV sur quatre qui sera un Ouigo", a indiqué M. Fanichet.
Un Ouigo roule beaucoup plus qu'un TGV classique, avec 700.000 km parcourus par an en moyenne contre 400 à 450.000 km pour une rame InOui.
La SNCF compte aussi optimiser au maximum le parc qu'elle a à sa disposition.
"L'an dernier, pour l'été, on a rajouté un demi-million de places, et on va continuer à augmenter la performance, c'est-à-dire faire plus rouler les trains", a insisté M. Fanichet.
"Mais il n'y aura pas de miracle. Je n'ai pas de rames neuves donc on fera quelques centaines de milliers de places en plus, on n'en fera pas des millions", a-t-il prévenu.
Le patron de SNCF Voyageurs a aussi rappelé que les prix des TGV InOui n'augmenteraient pas au-delà du niveau de l'inflation en 2024, tandis que ceux du Ouigo resteraient gelés, malgré la hausse des péages ferroviaires et du prix de l'énergie.
C.Blake--TNT